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Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/256

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demandant à rentrer dans le service ordinaire au conseil d’État : il accueillit ma très modeste prétention, mais il avait autre chose à penser.

Durant les mois de septembre et d’octobre, je restai à Paris, et, pour faire trêve aux terribles préoccupations de la guerre, aux terribles nouvelles qu’apportait chaque courrier, le hasard me remit en voie de philosophie.

C’était l’époque où commençait la croisade contre la philosophie du xviiie siècle. M. Laromiguière, l’un de ses plus fervents adeptes et de ses meilleurs disciples, lui avait porté les premiers coups. En se flattant de la placer à l’abri de toute atteinte par des distinctions ingénieuses, il avait ouvert la brèche ; M. Royer-Collard y montait hardiment, le drapeau de la philosophie écossaise à la main, et l’agrandissait à coups redoublés.

M. Desrenaude, que je retrouvai à Paris, me proposa d’assister à ce duel, qui tenait en éveil toute la jeunesse des écoles ; il me conduisit au cours de Laromiguière ; je ne sais pourquoi je n’allai point à celui de M. Royer-Collard, mais ce ne fut pas de dessein prémédité.

M.. Laromiguière professait avec une lucidité merveilleuse et une grâce charmante. Il avait beau-