Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/277

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essais, auxquels je n’attache, d’ailleurs, aucune importance, le passage suivant :

« Montesquieu, entraîné par son amour pour son pays, a fait fléchir souvent la justesse de son jugement pour présenter aux Français leur gouvernement comme l’un des trois types sur lesquels doivent être modelés tous les autres. Mably n’a pas dissimulé l’opinion contraire. On sait qu’il dit un jour avec humeur, en entendant parler de quelques améliorations : Tant pis, cela fera durer la vieille machine qu’il faut détruire. Le dessein de Montesquieu était raisonnable ; il est triste de penser que Mably avait raison. »

Ce peu de lignes dépose de l’état de mon esprit à cette époque et de la fidélité de mes souvenirs actuels.

Quelle que fût, néanmoins, la modération de mes desseins et de mon caractère, par cela seul qu’ils étaient contraires au courant des idées et des sentiments à la mode, je ne tardai guère à devenir, pour la cour du nouveau roi et pour la haute société, un apprenti jacobin. La conduite de M. d’Argenson y fut pour quelque chose. Il avait nettement et sèchement refusé la mission de commissaire royal, délégué pour faire reconnaître et installer dans les