Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/312

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fut pour lui une pilule fort amère, qu’il avala d’assez bonne grâce.

Durant le peu de jours que je passai à Paris, et dans le peu de salons bonapartistes que je n’avais jamais cessé de fréquenter, Dieu sait tout ce qu’il me fut donné de poignées de main, prodigué d’assurances et de protestations ; on se serait cru aux premiers jours de l’Assemblée constituante.

J’attachais à ces protestations sincères et frivoles toute l’importance qu’elles méritaient ; c’était autant de variations sur ce thème qui peint l’époque même : Comment ne serais-je pas libéral ? j’ai servi dans les mamelouks ; mais c’était autant de manifestations qui rendaient impossibles, du moins dans les premiers moments, le rétablissement du despotisme impérial, et préparaient la ruine prochaine du despote. C’était là mon espoir ; je m’en expliquai même ouvertement un soir, dans le salon de madame Gay, en présence des gens de lettres et des hommes publics qui concouraient, sous la première Restauration, à la rédaction du Nain jaune. J’avais vu naître ce journal satirique dans le sein de cette société. J’avais assisté, plus d’une fois, aux soirées où la rédaction s’en préparait. Je n’y étais pas tout à fait étranger, en ce sens que j’avais permis