Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/99

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Esterhazy, qui me reçut avec politesse, et bientôt après m’admit dans l’intérieur de sa famille.

Il insista pour m’y garder après le départ de l’armée française et me combla d’égards, de soins, de prévenances. Les trois semaines de séjour que je fis dans cette maison hospitalière furent pleines d’agréments. Je partageais mon temps entre mes excellents hôtes et la maison du prince de Ligne.

Cette maison, située sur le rempart, était à la lettre une cage de perroquets. Elle se composait d’une salle à manger au rez-de-chaussée, d’un salon au premier, d’une chambre à coucher au second ; on montait de l’un à l’autre par une échelle de moulin. Chaque pièce était meublée de quelques chaises de paille, d’une table en bois de sapin, et de quelques autres petits objets d’une même magnificence. C’était là que le prince de Ligne recevait chaque soir, et même, au besoin, chaque matin, un petit nombre de personnes, pour qui le plaisir de la conversation tenait lieu de tout. Il y donnait régulièrement à souper chaque jour ; son souper consistait dans un maigre poulet, des épinards et des œufs durs. La soirée, souvent même la matinée se passait en interminables conversations, où tous les événements, de la cour de France, sous