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Page:Brontë - Le Professeur.djvu/97

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il y avait encore plus d’assurance dans les regards qui répondaient aux miens. Eulalie, les yeux fixés sur moi, semblait attendre, avec certitude de l’obtenir, le tribut spontané que méritaient ses charmes. Hortense me regardait avec audace et me dit en ricanant et avec une aisance impudente :

« Dictez-nous quelque chose de facile pour commencer, monsieur. »

Caroline rejeta la tête en arrière, et, me favorisant d’un sourire de sa façon, elle découvrit ses dents admirables, qui étincelèrent entre ses lèvres épaisses comme celle d’une quarteronne aux veines embrasées ; aussi belle que Pauline Borghèse, elle eut en ce moment l’air presque aussi impur que Lucrèce Borgia. Elle était d’une illustre famille, et plus tard, ayant su la réputation qu’avait acquise sa noble mère, je ne m’étonnai plus des qualités précoces de la fille.

Je compris tout d’abord que ces trois demoiselles se considéraient comme les reines du pensionnat et s’imaginaient éclipser par leur splendeur le reste de leurs compagnes. En moins de cinq minutes elles m’avaient révélé leur caractère ; en moins de temps encore ma poitrine s’était cuirassée d’indifférence et mon regard voilé d’austérité.

« Écrivez, mesdemoiselles, » repris-je d’une voix aussi froide que si je me fusse adressé à Jules Vanderveld et Compagnie.

La dictée commencée, mes trois belles m’interrompirent continuellement par des remarques et des questions inutiles auxquelles je répondis brièvement, lorsque toutefois je crus nécessaire d’y répondre.

« Monsieur, comment dit-on point et virgule en anglais ?

— Semi colon, mademoiselle.

— Semi-collong ! quel drôle de mot. (Ricanement.)