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Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/113

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me précipitèrent au milieu de la lande, sur le sommet des Hauts de Hurle-Vent, où je me réveillai en sanglotant de joie. Voilà qui vous expliquera mon secret aussi bien qu’aurait fait mon autre rêve. Ce n’est pas plus mon affaire d’épouser Edgar Linton que d’être au ciel ; et si l’individu pervers qui est ici n’avait pas ainsi dégradé Heathcliff, je n’y aurais jamais songé. Ce serait me dégrader moi-même, maintenant, que d’épouser Heathcliff. Aussi ne saura-t-il jamais comme je l’aime ; et cela, non parce qu’il est beau, Nelly, mais parce qu’il est plus moi-même que je ne le suis. De quoi que soient faites nos âmes, la sienne et la mienne sont pareilles et celle de Linton est aussi différente des nôtres qu’un rayon de lune d’un éclair ou que la gelée du feu.

Avant qu’elle eût terminé ce discours, je m’étais convaincue de la présence de Heathcliff. Ayant remarqué un léger mouvement, je tournai la tête et le vis se lever de la banquette, puis se glisser dehors sans bruit. Il avait écouté jusqu’au moment où il avait entendu Catherine dire qu’elle se dégraderait en l’épousant, et n’était pas resté pour en entendre davantage. Le dossier du grand banc empêcha ma compagne, assise par terre, de remarquer sa présence et son départ ; mais je tressaillis et lui fis : « Chut ! »

— Qu’y a-t-il ? demanda-t-elle en regardant nerveusement autour d’elle.

— Joseph est là, répondis-je : j’avais saisi à point nommé le roulement de sa charrette sur la route. Heathcliff va rentrer avec lui. Je me demande s’il ne serait pas à la porte en ce moment.

— Oh ! il n’aurait pas pu m’entendre de la porte ! Donnez-moi Hareton, tandis que vous préparerez le repas et, quand ce sera prêt, invitez-moi à souper avec vous. J’ai besoin de tromper ma conscience troublée et