Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/148

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faire face. Elle désire être débarrassée de ma société en ce moment, en tout cas !

Il regarda fixement l’objet de la conversation, comme on regarderait un animal étrange et repoussant, une scolopendre des Indes, par exemple, que la curiosité vous pousse à examiner en dépit de l’aversion qu’elle inspire. La pauvre enfant ne put endurer cet examen. Elle pâlit et rougit tour à tour et, tandis que les larmes perlaient sur ses cils, elle appliqua la force de ses doigts frêles à s’affranchir de la ferme étreinte de Catherine. Mais voyant qu’aussitôt qu’elle parvenait à soulever l’un des doigts posés sur son bras, un autre s’abaissait, et qu’elle ne pouvait se débarrasser de tous à la fois, elle se mit à employer ses ongles, dont les pointes ornementèrent bientôt de croissants rouges la main de sa geôlière.

— Quelle tigresse ! s’écria Mrs Linton en la relâchant et secouant sa main endolorie. Allez-vous-en, pour l’amour de Dieu, et cachez votre figure de mégère ! Quelle folie de révéler ces griffes devant lui ! Ne pouvez-vous deviner les conclusions qu’il en tirera ? Regardez, Heathcliff : voilà des instruments d’exécution… prenez garde à vos yeux.

— Je les arracherais de ses doigts, si jamais ils me menaçaient, répondit-il brutalement quand la porte fut refermée sur elle. Mais quelle était votre intention en agaçant ainsi cette créature, Cathy ? Vous ne disiez pas la vérité, n’est-ce pas ?

— Je vous assure que si. Voilà plusieurs semaines qu’elle se meurt d’amour pour vous. Ce matin encore elle extravaguait à votre sujet et m’accablait d’un déluge d’injures parce que je lui représentais vos défauts en pleine lumière, afin de refroidir son adoration. Mais n’y faites plus attention ; je voulais punir