Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/201

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avec mon mouchoir. Nos travaux étaient à peine terminés que j’entendis le pas d’Earnshaw dans le corridor. Mon aide baissa la queue et se colla contre le mur ; je me glissai dans l’encoignure de la porte la plus proche. Les efforts du chien pour éviter son maître n’eurent pas de succès, comme me l’apprirent un bruit de pas précipités et un hurlement prolongé et pitoyable. J’eus plus de chance : il passa, entra dans sa chambre et ferma la porte. Aussitôt après, Joseph monta avec Hareton pour le mettre au lit. J’avais trouvé un refuge dans la chambre de Hareton et le vieillard, en me voyant, dit :

— Y a d’la place pour vous et vot’orgueil, à présent, que j’pensions, dans la salle. Elle est vide. Vous pouvez l’avoir tout entière à vous, et à Celui qu’est toujours là en tiers, et en ben mauvaise compagnie !

Je profitai avec empressement de l’avis ; et, à l’instant même où je me jetais sur une chaise, près du feu, ma tête s’inclina et je m’endormis. Mon sommeil fut profond et doux, mais il prit fin beaucoup trop tôt. Mr Heathcliff me réveilla. Il venait de rentrer et me demandait, de sa manière charmante, ce que je faisais là. Je lui expliquai que, si j’étais encore debout si tard, c’est qu’il avait la clef de notre chambre dans sa poche. L’adjectif notre l’offensa mortellement. Il jura que sa chambre n’était pas et ne serait jamais la mienne et qu’il… mais je ne veux pas reproduire son langage ni décrire sa conduite habituelle : il est ingénieux et inlassable quand il s’agit de s’attirer mon horreur ! L’étonnement qu’il me cause parfois est tel que ma frayeur en est étouffée ; pourtant, je vous assure, un tigre ou un serpent venimeux ne pourraient m’inspirer une terreur égale à celle qu’il fait naître en moi. Il me mit au courant de la maladie de Catherine, accusa mon