Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/379

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s’imaginer qu’il en est capable. Ses lettres de conseils et de consolations m’ont considérablement diverti. Dans sa dernière, il recommandait à mon chéri d’être bien soigneux de sa chérie, et bon pour elle quand elle serait à lui. Soigneux et bon… voilà qui est paternel. Mais Linton a besoin pour lui-même de tous ses soins et de toute sa bonté. Linton peut très bien jouer le petit tyran. Il se chargera de torturer autant de chats qu’on voudra, pourvu qu’on leur ait arraché les dents et rogné les griffes. Vous aurez de jolis récits de sa bonté à faire à son oncle quand vous rentrerez chez vous, je vous assure.

— Sur ce point, vous avez raison, dis-je. Expliquez le caractère de votre fils, montrez sa ressemblance avec le vôtre ; et alors j’espère que Miss Cathy y regardera à deux fois avant d’accepter ce cadeau empoisonné.

— Je n’ai pas besoin d’insister pour le moment sur ses aimables qualités, car elle doit l’accepter ou demeurer prisonnière, et vous avec elle, jusqu’à la mort de votre maître. Je puis vous retenir ici toutes deux, parfaitement cachées. Si vous en doutez, encouragez-là à reprendre sa parole, et vous aurez l’occasion d’en juger.

— Je ne reprendrai pas ma parole, dit Catherine. Je l’épouserai avant une heure d’ici, si je puis ensuite retourner à Thrushcross Grange. Mr Heathcliff, vous êtes un homme cruel, mais vous n’êtes pas un démon ; et vous ne voudrez pas, par pure méchanceté, détruire irrévocablement tout mon bonheur. Si papa croyait que je l’ai abandonné avec intention, et s’il mourait avant mon retour, comment pourrais-je supporter l’existence ? J’ai fini de pleurer : mais je vais me mettre à genoux, là, devant vous, et je ne me relèverai pas, et mes yeux ne quitteront pas votre visage que vous ne m’