Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/384

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Nelly Dean. » Il m’a regardée d’un air surpris. J’ai vu qu’il n’avait entendu parler de rien et je lui ai raconté le bruit qui courait. Le maître écoutait ; il s’est mis à sourire et a dit : « Si elles ont été dans le marais, elles en sont sorties maintenant, Zillah. Nelly Dean occupe en ce moment votre chambre ; quand vous monterez vous pourrez lui dire de décamper : voici la clef. L’eau du marais lui est entrée dans la tête et elle aurait couru chez elle l’esprit tout dérangé ; mais je l’ai gardée jusqu’à ce qu’elle ait repris sa raison. Vous lui demanderez d’aller sur-le-champ à la Grange et d’annoncer de ma part que la jeune dame la suivra en temps utile pour assister aux obsèques de son père. »

— Mr Edgar n’est pas mort ? dis-je d’une voix étranglée. Oh ! Zillah ! Zillah !

— Non, non ; rasseyez-vous, ma bonne dame, vous n’êtes pas bien remise. Il n’est pas mort ; le docteur Kenneth pense qu’il peut vivre encore un jour. Je l’ai rencontré sur la route et l’ai interrogé.

Au lieu de m’asseoir, je saisis mon manteau et mon chapeau et je me hâtai de descendre pendant que le chemin était libre. En entrant dans la salle, je regardai s’il y avait quelqu’un qui pût me donner des nouvelles de Catherine. La pièce était inondée de soleil et la porte ouverte ; mais je n’apercevais personne. Comme j’hésitais à partir aussitôt, ou à revenir sur mes pas et à chercher ma maîtresse, une légère toux attira mon attention du côté du foyer. Linton était couché sur le banc, tout seul dans la salle, en train de sucer un bâton de sucre Candie, et suivant tous mes mouvements d’un œil apathique.

— Où est Miss Catherine ? demandai-je d’un ton sévère.

Je supposais que, le tenant ainsi tout seul, je pourrais,