Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/435

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— Dites que vous me pardonnez, Hareton, dites-le. Vous pouvez me rendre si heureuse par ce simple petit mot !

Il marmotta quelque chose que je ne pus entendre.

— Et vous serez mon ami ? ajouta Catherine.

— Non, vous auriez honte de moi tous les jours de votre existence : d’autant plus de honte que vous me connaîtriez mieux ; et ce serait insupportable pour moi.

— Alors, vous ne voulez pas être mon ami ? dit-elle avec un sourire doux comme le miel et en se glissant tout près de lui.

Je n’entendis plus de conversation distincte mais, en me retournant, j’aperçus, penchés sur la page du livre accepté, deux visages si radieux que je ne doutai pas que le traité n’eût été ratifié des deux parts ; et les ennemis furent, dès lors, fidèles alliés.

L’ouvrage qu’ils examinaient était plein de très belles illustrations dont le charme, joint à celui de leur position, les tint immobiles jusqu’au retour de Joseph. Le pauvre homme fut complètement abasourdi à la vue de Catherine assise sur le même banc que Hareton Earnshaw, la main appuyée sur son épaule, et stupéfait de la manière dont son favori supportait ce voisinage ; il en fut tellement affecté que de toute la soirée il ne fit pas une seule observation à ce sujet. Son émotion ne se révéla que par les profonds soupirs qu’il poussa quand il posa solennellement sa grande Bible sur la table et la couvrit de malpropres billets de banque tirés de son portefeuille, produit de ses transactions de la journée. Il finit par appeler Hareton, qui se leva.

— Porte ces billets au maître, mon gars, dit-il, et reste là-bas. J’montions dans ma chambre. C’t endroit-ci