Page:Brontë - Les Hauts de Hurle-Vent, 1946.djvu/464

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par ses camarades. Quoi qu’il en soit, maintenant encore je n’aime pas à être dehors quand il fait nuit ; et je n’aime pas à rester seule dans cette triste maison. C’est une impression que je ne peux pas surmonter ; je serai heureuse quand ils partiront d’ici pour aller à la Grange.

— Ils vont donc aller à la Grange ? dis-je.

— Oui, dès leur mariage, qui aura lien au jour de l’an.

— Et qui habitera ici, alors ?

— Joseph prendra soin de la maison et aura peut-être un garçon pour lui tenir compagnie. Ils vivront dans la cuisine et le reste sera fermé.

— À l’usage des fantômes qui voudront l’occuper, observai-je.

— Non, Mr Lockwood, dit Nelly, en secouant la tête. Je crois que les morts reposent en paix ; mais il n’est pas bien de parler d’eux avec légèreté.

À ce moment, la barrière du jardin tourna sur ses gonds : les promeneurs revenaient.

— Ils n’ont peur de rien, eux, grommelai-je en surveillant par la fenêtre leur arrivée. Ensemble, ils braveraient Satan et ses légions.

Comme ils franchissaient le seuil et s’arrêtaient pour jeter un dernier regard sur la lune — ou, plus exactement pour se regarder l’un l’autre à sa lueur — je me sentis une fois de plus irrésistiblement poussé à les fuir. Je glissai un souvenir dans la main de Mrs Dean et, sans prendre garde à ses remontrances sur ma brusquerie, je disparus par la cuisine au moment où ils ouvraient la porte de la salle. J’aurais ainsi confirmé Joseph dans sa croyance aux fredaines de la brave femme, si par bonheur l’agréable tintement d’un sou-