— Je dis que je suis bien : je n’ai ni toux, ni douleur, ni fièvre.
— N’y a-t-il pas d’équivoque dans cette assertion ? Est-elle la vérité vraie ?
— La vérité pure. »
Louis Moore la regarda fixement.
« Je ne puis moi-même, dit-il, découvrir aucune indication de maladie actuelle ; mais alors, pourquoi êtes-vous changée ?
— Suis-je changée ?
— Nous allons essayer de le prouver.
— Comment ?
— En premier lieu, je vous demande : dormez-vous comme vous aviez l’habitude de le faire ?
— Non ; mais ce n’est pas parce que je suis malade.
— Avez-vous l’appétit que vous aviez autrefois ?
— Non ; mais ce n’est pas parce que je suis malade.
— Vous rappelez-vous ce petit anneau attaché à ma chaîne de montre ? C’est celui de ma mère, et il est trop petit pour passer la jointure de mon petit doigt. Vous me l’avez plusieurs fois dérobé en jouant : il allait à votre index. Essayez-le maintenant. »
Elle permit l’épreuve : l’anneau tomba de la petite main amaigrie. Louis le ramassa et le rattacha à la chaîne. Une rougeur embarrassée colora le front de Shirley qui répéta encore :
« Ce n’est pas parce que je suis malade.
— Non-seulement vous avez perdu le sommeil, l’appétit, l’embonpoint, continua Moore, mais vos esprits sont continuellement en ébullition ; en outre, il y a dans votre œil une frayeur, dans vos manières une inquiétude nerveuse : ces particularités vous étaient autrefois étrangères.
— Monsieur Moore, nous nous arrêterons ici. Vous avez touché juste : je suis nerveuse. Maintenant, parlons d’autre chose. Quel temps pluvieux nous avons ! quelle pluie torrentielle et persévérante !
— Vous nerveuse ! Oui ; et, si miss Keeldar est nerveuse, ce n’est pas sans cause. Laissez-moi chercher cette cause. Laissez-moi voir de plus près. Le mal n’est pas physique : j’ai soupçonné cela. Il est venu en un instant. Je sais le jour. J’ai remarqué le changement. Votre douleur est mentale.
— Nullement ; ce n’est pas quelque chose de si noble, c’est simplement nerveux. Oh ! quittez ce sujet.