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— Ne m’admirez plus, alors ; aimez-moi, au contraire : fixez le jour de notre mariage ; pensez à cela ce soir, et décidez. »

Elle a soupiré un murmure inarticulé, mais expressif ; elle s’est précipitée ou plutôt s’est évanouie de mes bras, et je l’ai perdue.




CHAPITRE XII.

Le dénoûment.


Lecteur, nous devons régler maintenant nos comptes. Je n’ai plus qu’à narrer brièvement le destin de quelques-uns des personnages dont nous avons fait la connaissance dans le cours de ce livre, puis il faudra nous donner la poignée de main et nous séparer.

Revenons d’abord aux vicaires, les bien-aimés, trop longtemps négligés. Avancez, mérite modeste ! Malone, je le vois, répond promptement à l’invitation : il croit que je m’adresse à lui.

Non, Pierre-Auguste, nous ne pouvons rien avoir à vous dire. Nous ne pourrions nous résoudre à conter la touchante histoire de vos faits et de votre destinée. Ne savez-vous pas, Pierre, que le public a ses caprices ; que le vrai sans fard ne lui va point ; qu’il ne digérerait pas les faits dans leur simplicité ? Ne savez-vous pas que le cri du cochon n’est pas plus goûté maintenant qu’autrefois ? Si je racontais la catastrophe qui vous a atteint, le public tomberait dans des attaques de nerfs, et il n’y aurait qu’un cri pour demander des sels volatils et des plumes brûlées. « Impossible ! dirait-on par ci ; faux ! s’écrierait-on par là ; de mauvais goût ! » répondrait-on de toutes parts. Remarquez-le bien ! toutes les fois que vous présentez aux gens la vérité réelle et simple, elle est toujours dénoncée comme un mensonge ; ils la désavouent, la renient, la rejettent sur la paroisse. Au contraire, la création imaginaire, la pure fiction, est adoptée, caressée, trouvée jolie, convenable, merveilleusement naturelle ; le misérable petit bâtard