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LE CORRECTEUR TYPOGRAPHE

et latins, avec des notes et des commentaires remplis d’érudition. En 1596, Casaubon est désigné pour occuper à Montpellier une chaire de grec et de belles-lettres. Mais Henri IV l’appelle bientôt à Paris, où il lui confie une situation analogue et lui accorde la charge, très enviée alors, de bibliothécaire du roi, aux gages annuels de 400 livres, somme fort élevée. À la mort de Henri IV, Casaubon quittait la France, à la suite de l’ambassadeur de Jacques Ier, roi d’Angleterre ; il mourut à Londres le 1er juillet 1614. Casaubon fut un savant de premier ordre, un bon traducteur et un excellent critique ; sans doute ses ouvrages ne sont pas exempts de fautes, mais on y rencontre une sagacité merveilleuse et un jugement exquis ; il interprète ou rétablit les passages des Anciens avec un rare bonheur. Son Commentaire sur Strabon est le meilleur qui existe ; et ses travaux sur Théocrite et Athénée sont encore fort estimés des lettrés.

Pour terminer, citons rapidement les noms de Muret, né à Muret près Limoges en 1526, mort à Rome en 1585, philologue et poète, qui professa à Auch, à Bordeaux, au collège du Cardinal-Lemoine à Paris et à Toulouse ; appelé à Rome par le cardinal d’Este, il y donna des leçons fort suivies sur l’Éthique d’Aristote et sur le droit civil ; — Postel, dont les malheurs égalèrent la science, né en 1510 à La Dolerie près Barenton, mort à Paris en 1581 ; en 1538, il était professeur au Collège Royal de Paris ; de sa disgrâce date le début de sa vie errante en Allemagne, en Suisse, en Italie et en Turquie ; son application à l’étude des sciences grecques, latines et orientales devait lui troubler quelque peu la raison ; — Lambin, né à Montreuil-sur-Mer en 1516, mort à Paris en 1572 : en 1560, il était professeur de rhétorique, et, en 1561, de langue grecque au Collège Royal de Paris ; il travaillait, dit-on, avec un soin méticuleux, lentement, à des œuvres qui furent nombreuses et fort estimées : une édition d’Horace en 1561, de Lucrèce en 1561 également, de Cicéron en 1565-1566, de Plaule parue seulement en 1577, etc.

Ainsi, au xve et au xvie siècle, le correcteur possède dans la hiérarchie littéraire une situation élevée : tantôt il est recteur de l’Université, prieur de la Sorbonne ; tantôt il occupe une chaire dans un collège en renom ; d’autres fois, abandonnant les lettres pour les arts,