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LES CORRECTEURS EN PROVINCE
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les instances de Robert Gaguin, dit-on, se rendait à Paris où nous le voyons cité comme libraire dès l’année 1503 ; vers 1512, il fondait une imprimerie d’où sortirent des éditions de classiques fort estimées. Il fut peut-être le premier imprimeur qui encouragea et pratiqua à Paris la substitution, dans la typographie, de la lettre romaine au caractère gothique jusque-là employé en France[1]. Il mourut en 1535.

« Sébastien Gryphius[2] (1493-7 septembre 1556), qui s’établit à Lyon vers 1522 ou 1523, fut au xvie siècle l’un des imprimeurs les plus réputés de cette ville. S. Gryphius était un véritable érudit et un excellent latiniste : les louanges dont l’honorent Scaliger, Gesner, Macrin et tant d’autres savants le prouvent assez, comme les nombreuses préfaces et épîtres dédicatoires dans lesquelles, aussi bien pour le fond que pour la forme, il rivalise avec les meilleurs humanistes, ses contemporains, ses correspondants, ses clients et ses amis, auprès desquels son savoir et sa compétence jouissaient d’une honorable et légitime influence.

« En deux lignes condensées et précises, Gesner lui décerne le plus juste éloge : Innumeris, optimis libris, optima fide summaque diligentia, elegantiaque procusis maximam tibi gloriam peperisti, marquant ainsi les qualités essentielles d’un excellent imprimeur, le choix des livres, leur multiplicité, l’élégance des caractères et la correction du texte. Sous ce rapport, les éditions données par Gryphius méritent une entière approbation. La parfaite correction de ses impressions et l’habileté de son art sont prouvées par le premier volume in-folio des Commentaires de Dolet (1536), contenant 1708 colonnes, dont l’erratum signale seulement huit fautes. Dans la splendide Bible latine qu’il mit au jour en 1550, Gryphius, fier à juste titre de son exactitude, place son erratum, au verso du titre, en tête de son chef-d’œuvre typographique.

« Il serait injuste d’attribuer à Gryphius seul tous les mérites de ces soins attentifs et de la scrupuleuse correction de ses éditions : une bonne part, la plus grande part en revient aux savants collaborateurs et


    Paris dès 1495 ; cette dernière date nous paraît erronée, puisque, d’après quelques documents, en 14988, nous l’avons dit, Josse Bade était encore, à Lyon, correcteur chez le libraire Pinet. — Voir aussi p. 187. note 1.

  1. Voir encore, sur cette question, page 44 (Geoffroy Tory) et page 435, note 1.
  2. Baudrier, Bibliographie lyonnaise, 8e série, p. 17-18.