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Deux caractères différents de même corps ont rarement une épaisseur uniforme : cette dernière proportionnée à l’œil — gros, moyen, petit, allongé ou maigre — fait gagner ou perdre dans la composition.

Un caractère gagne ou perd sur un autre lorsque dans un nombre déterminé de lignes de même justification il entre plus ou moins de texte, et dès lors de lettres. Plus un type est petit et mince, plus il gagne sur un plus gros ; et, inversement, plus ce type est gros, plus il perd sur un plus petit.

Si, pour éviter de perdre ou pour gagner, le typographe doit composer avec des espaces moyennes, on lui recommande d’aller serré, ou d’aller au regagnage ; quand, au contraire, le compositeur est obligé d’espacer très largement, d’employer de grands blancs, on dit qu’il chasse.

La connaissance de quelques notions relatives aux différents genres de caractères est indispensable aux correcteurs, car il ne suffit pas d’apprendre les noms et les désignations des types usités couramment, non plus que de savoir que tel ou tel caractère est égyptien, et tel autre romain : il faut encore connaître, au moins succinctement, les relations qui existent entre leurs genres, afin d’éviter aussi bien dans la composition des textes courants que dans celle des travaux de ville ces heurts de goût qui produisent à l’œil des effets désastreux.

Entre les antiques et les romains, comme entre chacun des autres genres, il est nécessaire d’établir une gradation raisonnée ; une transition habilement ménagée plaira au lecteur et lui fera oublier les inégalités choquantes qui auraient pu lui déplaire en d’autres circonstances.

L’éducation de l’œil est dès lors un devoir que le correcteur ne saurait négliger, en raison de l’obligation qui lui incombe de signaler les erreurs de goût qu’un typographe négligent ou malhabile est exposé à commettre.


CARACTÈRES DE TEXTE


Il existe, pour la composition au texte courant des labeurs, un grand nombre de caractères de genres différents. On peut les ramener à quelques familles :

a) Le caractère romain proprement dit, dont, vers la fin du xve siècle, le fameux graveur champenois Nicolas Jenson fut le créateur et, au xviiie siècle, Didot le rénovateur. Transformé par les fondeurs du siècle suivant, il s’est subdivisé en caractère genre français, avec des déliés et