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FERVAAL

long récit de la genèse. Kaito, la déesse-serpent, enfanta de l’homme la race des dieux dont Fervaal est le dernier descendant. Cravann menacée ne sera sauvée que par le chef élu, le pur, le simple. Tandis que le pontife apprête tout pour le départ, Guilhen reprend Fervaal qui, dans l’ivresse nouvelle, lui raconte son enfance, comme Siegmund raconte la sienne, très pareille, à Sieglinde et à Hounding. La femme dit aussi sa libre jeunesse, la souveraineté que lui donna son père, maître de ces contrées. L’un et l’autre chantent la joie et la douleur de l’amour et l’appel d’Arfagard, par deux fois, retentit au loin comme retentit en la scène analogue de Tristan et Iseult l’appel de Brangæne. Mais Fervaal, revenu à la réalité, s’enfuit et nous savons, dès lors, que Guilhen se vengera en jetant contre Cravann ses soldats aventuriers.

Avant l’élection du chef, sur la déclivité du mont cévenol, le pontife, inquiet de l’avenir, interroge les brouillards qui prennent des formes changeantes et fantastiques et qui enfin présentent l’aspect d’un serpent immense. Comme Erda à Wotan, Kaito parle à Arfagard, prédisant le crépuscule des dieux, l’aurore d’une religion nouvelle : « Si le serment est violé, si l’Amour règne sur le monde, la Mort appellera ta Vie, la Vie naîtra de la Mort. » En la solennité de la