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Page:Bruneau - Musiques d’hier et de demain, 1900.djvu/187

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LA MUSE DE PARIS ET SON POÈTE

les garçons de là-bas donnent encore doucement aux filles. Les cinq tableaux symphoniques où M. Gustave Charpentier mit tout cela et bien d’autres choses formèrent son premier « envoi » qui, je n’ai pas besoin de le faire remarquer, contrastait singulièrement avec ce que les pensionnaires de la Villa Médicis ont coutume d’écrire. De retour à Paris, le compositeur loua une chambre à Montmartre et, là comme ailleurs, se passionna pour ce qui était autour de lui, pour la nature, pour ce qu’il voyait, pour ce qu’il entendait, pour ce qu’il ressentait directement. L’exaltation du cœur et des sens à l’aube de travail et d’amour ; le recueillement de l’âme aux accents de gravité mystérieuse des voix intérieures ; le désir de l’idéal, de l’inconnu où s’allumera la flamme divine ; le doute dans la nuit splendide et rapide, où tout est musique fuyante : brin d’herbe, arbre, étoile : la peur du Temps dont le silence cache le triomphe ou la mort de l’espoir, l’impuissance redoutée, affreuse, terrible de l’esprit tournant dans le vicie, maudissant Dieu ; l’ivresse dégradante, furibonde, croissant tandis que rit, que hurle la prostituée aux bras ouverts, tandis que retentissent et se mêlent les appels du passé et ceux de l’avenir : noblesse, bassesse, orgueil, lâcheté sont exprimés avec une extraordinaire véhémence, une éton-