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Page:Bruneau - Musiques d’hier et de demain, 1900.djvu/218

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MUSIQUES D’HIER ET DE DEMAIN

mensonge avait semé sur la terre heureuse de mélodie, d’harmonie et de beauté où, après tant de nobles œuvres sincères, expressives et libres, des ouvrages de fausseté, de formules et de convention apparurent qui, par tout ce qu’ils avaient de trompeur et de vain, séduisirent la foule. Les voilà morts, et ce sera le grand honneur de M. Verdi d’avoir pu, à la fin de sa carrière, par une glorieuse et magnifique évolution de pensée, leur porter le dernier coup.

La leçon du vieux maître est-elle entendue ? Nous n’en devons pas douter. Sera-t-elle comprise et donnera-t-elle ses fruits ? Je veux encore l’espérer. Les jeunes compositeurs italiens sentent bien que le morceau à roulades, la cavatine avec point d’orgue, les couplets et autres tranquilles amusettes sont devenus hors d’usage. Pour réagir contre l’immobilité de l’opéra d’hier, ils se précipitent dans la vie avec une ardeur que j’aime, mais qu’il faudrait régler. Les développements sommaires de leurs pièces, la facilité d’improvisation dont ils témoignent, l’empressement qu’ils apportent à entasser partitions sur partitions constituent le plus grave des dangers. Toute production de l’esprit, d’où quelle vienne, où qu’elle aille, négligeant l’étude des caractères, insuffisammant réfléchie, hâtivement faite en vue du succès, est condamnée d’avance