Page:Brunet - Le mariage blanc d'Armandine, contes, 1943.djvu/15

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vaient dire plus. On ne se rappelle pas le détail d’un accident. L’amour et le mariage, dans la vie d’Armandine, c’était un accident, c’était même une catastrophe. Passons donc à l’église avec Armandine qui trempait copieusement sa main dans le bénitier.

À l’église, elle ne passait pas, elle y coulait tous ses instants libres. Femme de maison, Armandine était aussi une femme d’église. Je l’ai rencontrée souvent en prières. La première fois, lorsque, reprenant timidement des habitudes oubliées, dans l’ombre d’un bas-côté, où je cachais mes tentatives d’oraison, je sursautai. Une longue forme noire me touchait le bras et, sans préambule, me tendait un feuillet de prières, la neuvaine des Trois Ave Maria, me conjurant d’entrer en union de prières avec elle. Armandine fut mon initiatrice à la communion des saints. Plus tard, lorsque j’allais à l’église, les heures qu’il y a moins de dévotes, dans l’ombre, j’entendais des gémissements, puis un chuchotement rapide, et, ainsi que l’on s’habitue au clair obscur, je saisissais quelques mots : « Mon Dieu, ayez pitié de papa, qui est peut-être au purgatoire, de maman, de mon oncle Arsène, qui a besoin de