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DE PHILIPPE

ces gestes mécaniques : « Comme c’est sauvage, puéril ! Mais je ne suis pourtant pas M. Homais. Il y a peut-être du divin dans le monde. » Déjà l’instable Philippe était troublé, et il dut repasser ses preuves de l’inexistence de Dieu. Il regardait le mur : « Cela est de la matière, et la matière exclut Dieu. » Chose amusante, cette sensation fort subjective, qui, à ce moment, rassurait son incrédulité lui servit plus tard à étayer ses croyances : la matière lui prouvait Dieu alors, parce que sans Dieu, elle s’écroulait, elle s’anéantissait. Ces sortes de sensations cérébrales perdaient du reste leur force lorsqu’elles se manifestaient dans des concepts et des phrases, métaphysique de l’inconscient. Philippe percevait-il que sa volonté décidait en dernier ressort et qu’en ce moment il n’était pas sorti de cette décision qu’il avait prise en son adolescence de se choisir, lui, Philippe, de choisir Philippe, l’être après tout qui l’ennuyait le plus, qu’il méprisait même, et c’est pourquoi il ne cessait ses introspections, pour le tuer d’explications et de commentaires psychologiques ?

Un prêtre confessait, et Philippe eut la velléité d’aller au confessionnal. Il aurait peut-être tout dit, mais sans foi, pour le plaisir d’une confession profane, surtout pour satisfaire ce goût qu’il avait de frôler la chose religieuse, comme il disait : tel l’impuissant qui ne parle que de sexualité, tel l’inverti qui passe son temps avec les femmes.