Page:Brunetière - Cinq lettres sur Ernest Renan, 1904.djvu/12

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sottises ; et, en effet, nous en avons pu déjà voir un échantillon dans l’appel que le contre-amiral Réveillère, — l’inventeur de l’autarchisme, — et les citoyens Théodule Ribot, « de l’Institut », Paul Guieysse, ancien ministre, et Armand Dayot, viennent d’adresser aux « Bleus de Bretagne[1] ».

    nous tous qui faisons profession d’histoire ou de critique, de n’être pas toujours prêts ? Telle est l’origine de ces Lettres.

    Je les publie telles que les a données l’Ouest-Éclair, et je n’y fais que de rares et insignifiantes corrections de style. Si je voulais leur enlever de leur air d’improvisation, je n’y réussirais sans doute pas ; et, vraiment, à quoi cela servirait-il ? Mais, puisque je faisais tant que de les réimprimer, je ne me suis pas refusé le plaisir d’y ajouter quelques notes, où l’on trouvera quelques citations de Renan, ce qui ne sera pour déplaire à personne ; des indications, qui précisent ou qui développent quelques assertions trop vagues ou trop laconiques du texte ; et, chemin faisant, deux mots de réponse à quelques-unes des objections que l’on m’a fait l’honneur de m’opposer.

  1. Les « Bleus de Bretagne » n’étaient guère connus, hors de Bretagne, que pour avoir bruyamment inauguré, l’année dernière, une statue de Lazare Hoche, à Quiberon, c’est-à-dire « dans le seul lieu de France où on ne dût pas la lui élever ». Ainsi le pensais-je, et je l’avais dit. Mais, à mon grand étonnement, quelques journalistes parisiens n’ont pas été de mon avis, et l’un d’eux a bien voulu m’apprendre que les « victimes de Quiberon » n’étant que des émigrés, c’était le moins qu’on les eût passées par les armes. Sait-il seulement dans quelles conditions ? En tout cas, chacun a sa manière de voir. La mienne, c’est que le droit de la guerre s’arrête à l’ennemi désarmé ; que des soldats ne sont pas des bourreaux ; qu’un général en chef se déshonore quand il en fait l’office ; — et si c’est bien ce que Hoche a fait à Quiberon, je laisse au lecteur le soin de conclure.

    J’ajoute que parmi les six cent quatre-vingt-une victimes qui ensanglantèrent la lande lugubre que la piété populaire du pays d’Auray a baptisée du nom de « Champ des Martyrs », « il y avait des vieillards hors d’âge, des domestiques qui n’avaient fait que suivre leurs maîtres, des prêtres, des journaliers, des