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Page:Brunetière - Histoire de la littérature française classique 3.djvu/416

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HISTOIRE DE LA LITTÉRATURE FRANÇAISE CLASSIQUE

profondes, elles ont modifié l’esprit humain : c’est qu’elles étaient éminemment pratiques.

L’homme est le terme unique auquel il faut tout rameuer ; abstraction faite de mon existence et du bonheur de mes semblables, qu’importe le reste ?

Ainsi s’exprimait Diderot dans l’article Encyclopédie. Il n’est personne qui ne l’entende quand il parle ainsi ; de cette formule, il n’y a si mauvais raisonneur qui ne sache tirer les conséquences ; et il en résulte un effet imprévu, qui est que les adversaires de V Encyclopédie ne réussissent, en l’attaquant, qu’à propager ses propres idées.

C’est, en effet, le troisième moyen de propagande que les Encyclopédistes ont h leur service. Parmi ces adversaires, prenons-en deux seulement, par exemple, les plus célèbres ou les plus bruyants : Palissot et Fréron, l’auteur de la Comédie des philosophes, et le directeur de l’Année littéraire. Il ne survit du premier qu’un titre, celui de sa comédie jouée le 2 mai 1760, un an après l’interdiction de V Encyclopédie, et l’honneur d’avoir été mêlé à une querelle qu’il n’était pas de force à soutenir. Sa comédie n’est qu’un pastiche des Femmes savantes. L’intrigue est à peu près la même : c’est une mère philosophe qui veut marier sa fille à un philosophe, en la reprenant à un ancien fiancé, et qui en est empêchée par les preuves qu’on lui donne de la trahison de ses amis les philosophes. Dans cette pièce, Rousseau, d’Alembert, Duclos, Diderot sont pris à partie, le dernier surtout, dont Palissot raille les prétentions, l’emphase, les doctrines, mais d’une façon si misérable que c’est