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tions, la dernière vanité dont se doive piquer le critique ou l’historien de la littérature, n’est-ce pas celle de paraître neuf ?


I

Si l’on veut se faire d’abord une juste idée de l’œuvre de Leconte de Lisle, et mesurer l’importance des Poèmes antiques et des Poèmes barbares dans l’histoire de la poésie contemporaine, il y faut voir avant tout, comme dans l’œuvre de Flaubert, — que j’en rapprocherai plus d’une fois, — comme dans la Tentation de Saint Antoine et comme dans Salammbô, une protestation contre le romantisme. Ce n’est pas à dire que Leconte de Lisle et Flaubert n’aient largement profité l’un et l’autre de la révolution opérée par Hugo. La solidarité qui lie les générations des hommes ne nous permet jamais d’échapper entièrement à l’influence de ceux qui nous ont précédés ; et à cet égard, on ne s’expliquerait pas plus Leconte de Lisle sans Hugo, que Racine autrefois sans Corneille, ou Malherbe encore sans Ronsard. Mais quand la dette de l’auteur de Phèdre et d’Athalie serait plus considérable encore qu’elle ne l’est envers celui de Polyeucte et du Cid, personne aujourd’hui n’ignore que le système dramatique de Racine diffère profondément de celui de Corneille, si même il ne faut avouer qu’il en