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tableaux de Rossetti, mais dans ceux de tous les peintres préraphaélites aussi longtemps qu’ils restèrent sous son influence. Voyez comme exemples : le Paolo et Francesca de Watts, le Roméo et Juliette de Ford-Madox Brown, l’Ophélie et l’Isabella de Millais, le Claudio et Isabella de Hunt, la Béatrice de Burne-Jones ; les titres seuls des tableaux sont assez suggestifs par eux-mêmes pour justifier de cette influence poétique.

Indépendamment de cette source d’inspiration poétique, il en est deux autres auxquelles puisent Rossetti et les peintres préraphaélites : la mythologie et les légendes, spécialement le cycle des légendes de la Table ronde qui a, je crois, fourni des sujets à tous les peintres de l’école. En prenant le mot dans son sens le plus large, on pourrait même dire que l’inspiration n’est que mythologique, en ce sens que sous une forme plastique elle cherche à rendre des pensées et des sentiments et non simplement des formes ou des impressions de nature, comme l’ont fait d’autres écoles.

En même temps qu’ils lui donnaient le souci de la forme, la lecture des classiques et l’amour de la renaissance italienne avaient inspiré à Rossetti le désir de l’ordre, de la clarté, le soin de l’ordonnance générale du tableau, et en un mot le goût du côté décoratif de l’œuvre. Ce goût existait chez tous les membres de l’école préraphaélite ; il était parculièrement marqué chez Rossetti ; il a été développé et perfectionné autant qu’il pouvait l’être, comme nous le verrons tantôt, par trois artistes de la même école, MM. Edward Burne-Jones, William Morris et Walter Crane.

En résumant maintenant les quelques remarques que nous venons de faire, nous trouvons la définition de l’école préraphaélite que nous cherchions en commençant et qui pourrait, me semble-t-il, se formuler ainsi : une école de peinture née de l’influence de la renaissance italienne sur la poésie anglaise contemporaine, s’inspirant de cette poésie et de l’amour de la

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