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LES DÉCOUVERTES GÉOLOGIQUES

il ne serait pas exact de dire, et la Genèse ne dit pas, dans le verset 3 du chapitre 1, que la lumière fut créée[1], bien qu’on puisse dire littéralement qu’elle fut mise en action.

Enfin, lorsque le quatrième commandement (Exode XX, 11) rappelle les six jours de la création, on y retrouve le mot asah — « faire, » — le même qui se trouve aux versets 7 et 16 du 1er chapitre de la Genèse, et que nous avons déjà prouvé être d’une signification moins forte et moins étendue que le mot bara — « créer, » — et comme il n’entraîne pas nécessairement la création de rien, il peut être ici employé à désigner un nouvel arrangement de matériaux qui existaient déjà[2].

Mais nous rappellerons en terminant que ce n’est nullement le récit de Moïse en lui-même dont nous mettons en question l’exactitude, mais seulement la manière dont il doit être interprété ; et nous devons avoir surtout présent à l’esprit que l’objet de ce récit n’est aucunement d’établir de quelle manière, mais bien par qui le monde fut créé. Comme il y avait une tendance de l’esprit humain, dans ces premiers âges du monde, à adorer les objets les plus glorieux de la nature, et nommément le soleil, la lune et les étoiles, nous devons croire que Moïse, en racontant la création, eut pour but principal de préserver les Israélites du polythéisme et de l’idolâtrie des nations qui les entouraient, en proclamant que tous ces corps célestes, si pleins de magnificence, n’étaient pas eux-mêmes des Dieux, mais seulement l’ouvrage d’un créateur unique et tout puissant auquel seul devait s’adresser l’adoration des hommes[3].

  1. Voyez la note page 18.
  2. Voyez la note page 26.
  3. Après m’être ainsi hasardé à entrer dans une série d’explications qui, je pense, prouvent entièrement l’accord qui existe entre le texte littéral même de la Genèse et les phénomènes géologiques, je m’abstiendrai d’en dire plus long sur ce sujet important, et je suis heureux de pouvoir renvoyer mes lecteurs à quelques admirables articles du Christian observer. (Mai, juin, juillet, août 1834.) Ils y trouveront un résumé très-net et très-complet de cette question, dans lequel sont présentées les difficultés dont elle est entourée, en même temps que l’on y propose plusieurs idées modérées et judicieuses sur l’esprit dans lequel doivent se faire de semblables investigations. Je renverrai aussi aux divers ouvrages dont les noms suivent : Sermons de l’évêque Horsley, in-8o, 1816 ; 3e vol., série 39 ; — Records of Création, par l’évêque Bird-Sumner, 2e vol., p. 356 ; — Douglas, Errors regarding religion, 1830, p. 261-264 ; — Higgins, On the Mosaical and Minerai Geologies, 1832 ; — et plus spécialement à l’éloquent et admirable discours du professeur Sedgwik sur les Études de l’Université de Cambridge, 1833 dans lequel il a fait voir avec beaucoup d’habileté tous les rapports qui unissent la Géologie et la religion naturelle, et où il résume en ces termes sa précieuse opinion sur le genre d’instruction que nous devons rechercher dans la Bible : « La Bible nous apprend que l’homme et les autres êtres vivans n’ont été placés sur cette terre qu’il y a peu d’années, et tous les monumens physiques viennent à l’appui de cette vérité. Si l’astronomie nous fait voir des myriades de mondes dont il n’est pas question dans les livres sacrés, la géologie nous prouve de son côté (et non point à l’aide d’argumens tirés de l’analogie, mais bien en employant l’évidence incontestable des faits physiques) que notre planète fut placée primitivement dans des conditions physiques très-diverses, séparées les unes des autres par de longs intervalles de temps et pendant la durée desquelles l’homme et les autres créatures de même date n’avaient pas encore été appelés à l’existence. Des périodes telles que celles-là n’appartiennent donc pas à l’histoire morale de notre race, et ne sont comprises ni dans la lettre ni dans l’esprit de la révélation. Qui oserait dire quelle distance sépare le jour où fut créée la terre et celui où il plut à Dieu de placer l’homme à sa surface ? Sur ces questions, l’Écriture se tait, mais son silence ne détruit pas la signification de tous ces monumens physiques que Dieu a placés sous nos yeux pour nous attester sa puissance, en même temps qu’il nous a donné toutes les facultés qui peuvent nous conduire à les interpréter et à en comprendre les enseignemens.