Page:Buffault - Étude sur la côte et les dunes du Médoc.djvu/101

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

synchrone avec lui. De sorte que la presqu’île médocaine aurait été affectée d’un mouvement de balance autour d’un axe passant à peu près en son milieu, c’est-à-dire vers Blanc, à l’ouest de Lesparre, Vensac, le Jeune Soulac et la Pointe de Grave. Un mouvement oscillatoire semblable se produit en Scandinavie et en Chine. En Médoc, on ne peut affirmer qu’il existe ou ait existé, les repères et indices manquant absolument du côté du fleuve.

En ce qui concerne le rétrécissement brusque de l’embouchure de la Gironde, il est certain que la Pointe de Grave proprement dite, depuis les rochers de St -Nicolas, est constituée par une masse de sable pur ci de gravier occupant une portion du lit du fleuve. Ce cap, cet atterrissement doit alors sa formation à la combinaison des courants fluviaux avec les courants marins qui creusèrent la passe de Grave. Les uns et les autres en se rencontrant laissèrent déposer en cet endroit du fleuve, le long du rivage de l’époque, dans une masse d’eau neutre en quelque sorte, c’est-à-dire où ces courants n’agissaient plus, une partie des matériaux qu’ils charriaient. C’est précisément sa nature alluvienne et peu consistante qui facilite maintenant l’érosion de cette pointe par de nouveaux courants. Peut-être ceux-ci finiront-ils, à force de creuser le gouffre sous l’épi de Grave, par emporter cette pointe et par rendre à l’estuaire Girondin son ancienne rive gauche que marquaient autrefois les massifs rocheux de Cordouan et de St -Nicolas.

C’est en se basant sur ces faits que M.  Goudineau reproche aux Ponts et chaussées d’avoir consacré leurs travaux à défendre cet atterrissement quasi-fortuit et précaire de la Pointe de Grave, au lieu d’établir, suivant son projet, un barrage des rochers de St -Nicolas à Cordouan assis sur l’ancienne arête rocheuse de la presqu’île. Ce barrage aurait fermé la passe de Grave, provoqué ainsi par de nouveaux atterrissements la reconstitution de l’antique péninsule médulienne (la Pointe de Grave actuelle étant abandonnée) et assuré la navigabilité de la Gironde.

Dans son mouvement de translation vers le N.-E., la Gironde obéit du reste à une loi générale dont on constate nettement les effets sur les fleuves de France, de la Seine à la Gironde. Ces cours d’eau sont reportés vers le nord et rongent leurs berges septentrionales qui sont pour cela plus abruptes que les berges méridionales. La cause de ce phénomène paraît résider dans l’influence prédominante des vents du sud et dans l’action de la rotation du globe.

Il est en, outre des faits bien établis qui rendent compte des variations de la côte fluviale. Ce sont le colmatage par le fleuve lui-même, l’établissement des digues et clayonnages, et le dessèchement des marais par l’homme.

Nous avons dit comment, il y a seulement 500 ans, la partie nord-est du Médoc était une vaste et irrégulière nappe d’eau, alimentée par la Gironde, et de laquelle émergeaient les îles de Talais et de Jau, les