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Page:Buffault - Étude sur la côte et les dunes du Médoc.djvu/187

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d’un énorme amas de sable blanc d’une dizaine de mètres de hauteur qui court du nord au sud, cachant la mer, et dont le sommet affecte une horizontalité parfaite. C’est la dune littorale, qui reçoit les apports sableux de la mer et protège la végétation installée à l’est. La lède qui la précède est garnie de minuscules arbrisseaux et d’herbes diverses, surtout d’immortelles dont les acres senteurs se mêlent à la brise saline. On gravit le talus abrupt de la dune littorale et, de sa plateforme, tout à l’impression de la majesté de l’océan, on domine la plage de sable fin où les lames s’étalent sans relâche.

Si l’on descend sur la plage et que l’on jouisse d’une chaude journée où le soleil luit sans ombre dans le ciel pur, on peut remarquer, en regardant soit au nord, soit au sud, qu’au loin vers l’horizon, le sable de la plage cesse tout à coup et fait place à l’eau bleue de la mer. Il semble que les flots couvrent là-bas le sable ou que la rive fait une brusque rentrée dans les terres. Mais si vous avancez vers le nord ou vers le sud, le phénomène marche avec vous et, sur la côte absolument rectiligne, vous n’atteindrez jamais cette eau bleue qui recule et qui suit. C’est un effet de mirage qui se produit ici, absolument comme au Sahara. Il est d’autant plus apparent que la mer plus basse fait la plage plus large. On peut l’observer même sur la plate-forme nue de la dune littorale, où il est plus bizarre encore.

Pour avoir un autre aspect des dunes, passons en Bas-Médoc et allons à Vendays. Le paysage de cette plaine presque parfaitement horizontale est à la fois très simple et très agréable. Les éléments qui le constituent se placent en quelque sorte eu un seul plan, on pourrait dire sur une seule ligne : des vignes et des prairies verdoyantes, des champs de mats jaunissant à l’automne,- de petits bois de chênes ou de pins à peine élevés au-dessus de l’horizon et dessinant sur le ciel un profil légèrement ondulé qu’interrompt par endroits un long pin à ta cime ajourée ; de-ci de-là, quelques petites maisons très blanches, propres, avec une toiture plate de tuiles rouges et jaunâtres, ayant un figuier tortueux adossé à leur pignon ; parfois un vieux moulin, bas, coiffé d’un toit pointu de planches grises, offrant au vent ses quatre bras maigres privés de leurs toiles. Ce peu de choses donne une impression de calme et d’attrait indéfinissable qui repose l’œil et l’esprit.

À Vendays, l’on prend une route qui fait de nombreux détours dans la campagne, puis à l’un de ses coudes, tout à coup, l’horizon apparaît vers l’ouest par une ligne ondulée de collines boisées : les dunes. Le paysage se continue, mais plus désert, et la route devient petit chemin. Près de Bumet, vignes, maisons et champs disparaissent, et ce n’est plus que la lande broussailleuse et herbue avec des boqueteaux. Puis le chemin se perd au bord d’un cours d’eau de très modeste apparence, qui roule un peu d’eau paisible au milieu de marécages et que nous passons à gué. Ici, un souvenir du passé. C’est le fleuve Anchise que nous traversons, et nous sommes près de l’endroit