Page:Buffault - Étude sur la côte et les dunes du Médoc.djvu/190

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périeure affleure à un même plan horizontal. Au delà se trouve l’anse des Huttes, où la côte est comme blindée par les remarquables ouvrages de défense dont nous avons exposé l’historique en l’empruntant à la magistrale Géographie d’Élisée Reclus. Ces ouvrages ajoutent beaucoup au pittoresque de cet endroit du littoral. Une digue hérissée de grosses pierres court parallèlement au rivage, offrant une résistance victorieuse à l’assaut des lames écumantes. Derrière elle, vers son milieu, se dresse une sorte de grande pyramide tronquée qui semble le tombeau de quelque géant des temps antiques.

Au sud le brise-mer se continue vers Soulac par une série de digues et d’épis.

L’anse des Huttes est dominée par une dune à pente abrupte vers la mer, qui porte sur sa crête une tour carrée noire d’aspect étrange. Cette tour sert de balise et se trouve au bord de la forêt qui couvre les dunes de Soulac et du Verdon. De sa base on voit, vers l’est, à l’extrémité d’une large allée, le sémaphore de S’-Nicolas juché sur un sommet élevé. Du Sémaphore, la vue est admirable. On découvre le large estuaire de la Gironde et les palus du Bas-Médoc ; au nord, les coteaux de Saintonge avec les blanches constructions de Royan ; à l’ouest, Cordouan au milieu des flots azurés. Aux pieds du spectateur, la forêt déroule sur un terrain accidenté ses vertes frondaisons, et au sud les toits rouges de Soulac émergent de la verdure.

La partie de forêt voisine de la Tour noire et du Sémaphore est la plus jolie de toutes les dunes du Médoc. Loin d’être la pineraie sombre et triste des grandes dunes d’Hourtin et Carcans, elle semble plutôt un parc qui offre, au printemps, de ravissantes promenades. Les chênes verts et blancs y sont mélangés en abondance aux pins. Des acacias chargés de grappes de fleurs blanches égaient la verdure des grands arbres et parfument la brise. En sous-bois : les genêts aux gerbes d’or et les troènes aux thyrses blancs, parmi lesquels des lianes de chèvre- feuille épanouissent leurs fleurs rosées aux délicates senteurs. De nombreux rossignols apportent la poésie de leurs trilles et ajoutent le plaisir de l’ouïe au plaisir des yeux. De grands garde-feu plantés d’une double ligne de chênes, d’acacias et de frênes, permettent de circuler aisément dans ce coin de dunes favorisé de la Nature et embelli par l’homme.

Au sud, entouré de bois, est Soulac construisant activement ses coquettes villas sur l’emplacement même de la cité disparue, auprès de la basilique dont les murailles antiques et sévères contrastent curieusement avec les gaies couleurs et les ornements des habitations nouvelles.

Le soir, au coucher du soleil, allez vous asseoir au pied de ce monument des âges écoulés, sur les ruines du monastère. Isolez-vous des bruits de la ville pour n’écouter que la grande voix de l’océan et le bruissement du vent dans la pignada voisine. Songez aux cata-