Page:Buffault - Étude sur la côte et les dunes du Médoc.djvu/53

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contraire de l’état topographique actuel et cela est dû, nous l’expliquerons, au déplacement des rives océanique et fluviale. Mais ce déplacement est indéniable et en voici les preuves.

Le fleuve recouvrait jadis les marais fit palus de Soulac dont le fond s’est depuis exhaussé et asséché sous l’influence de phénomènes que nous exposerons au chapitre suivant. Les vieux rôles gascons relatent que les princes anglais se sont souvent embarqués à Soulac pour rentrer en Angleterre et y ont débarqué venant en Guienne, notamment le roi Henri III en 1242 et 1243. Or un port sûr était impossible à cette époque sur la côte océanique ravagée depuis l’an 580 par les courants marins et n’est admissible que sur la Gironde. Là il s’explique aisément puisque autrefois le fleuve recouvrait tous les marais et palus actuels de Soulac et du Verdon.

Si l’on examine la carte du Bas-Médoc dressée par Blaw vers 1650, on voit au N.-E. de Soulac, entre cette ville et le fleuve, un vaste espace sensiblement triangulaire occupé par les marais salants de Soulac, au milieu desquels serpente un fort chenal. Sur ce chenal, à 1 kilomètre de la ville, se trouve le mot Port et un chemin est indiqué reliant Soulac à ce point.

C’est là évidemment ce qui restait en 1650 de l’ancien port fréquenté par les Anglais. Les marais sont aujourd’hui desséchés et à l’état de prairies. On doit penser, par analogie, qu’avant le XVIIe siècle, ces marais étaient complètement sous l’eau, ce qui rendait l’existence du port absolument naturelle.

De même et d’après les anciennes cartes, les marais du Logis étaient autrefois une dérivation du fleuve.

Ajoutons cette observation sur ce texte de Baurcia : « Celle-ci (l’église de Soulac) étoit située sur une hauteur dont le fond paroissoit ferme et solide. Les anciens habitants de cette Paroisse prétendoient que les terres situées au midi, couchant et nord de cette Église formoient autrefois une vaste plaine d’un terrain inégal et mêlé de monticules, de pays plat et de quelques marais. » Il y avait donc jadis des terres tout autour de Soulac excepté à l’est de la ville, qui est précisément le côté de la Gironde. S’il n’existait pas de terre là, il ne pouvait donc y avoir que le fleuve et ses dérivations.

Ces terres étaient en culture, avec quelques parties marécageuses. Des bois de pins et de chênes y étaient entremêlés ; au bord de la mer s’étendait la grande pineraie de l’abbaye.

À l’époque que nous considérons, la Guyenne était complètement sous la domination anglaise. L’ancienne église ou chapelle de Soulac avait été remplacée au XIe siècle par la grande basilique qui est restée debout jusqu’à nos jours malgré de nombreuses et malheureuses modifications. Cet édifice se composait d’abord du vaisseau à 3 nefs actuel, terminé à son chevet par trois chapelles absidiales. À la croisée du transept était une voûte à dôme surmontée d’un