Page:Buffault - Étude sur la côte et les dunes du Médoc.djvu/83

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qui se formaient dans les bas-fonds inondés où le vent jetait doucement et sans le tasser du sable sur les eaux. La masse sableuse tenue en suspension par l’eau, pour ainsi dire, s’écroulait à la moindre pression du pied. Ordinairement, on ne s’enfonçait pas très profondément et on s’en tirait sans trop de difficulté, si l’on avait soin de ne point précipiter les mouvements. Aujourd’hui, l’on ne trouve plus que quelques blouses sur les plages de la mer et des étangs.

Dans les lèdes erraient de pauvres troupeaux de vaches et de chevaux qui y vivaient à peu près à l’état de nature. Le plus souvent, on les laissait seuls, livrés à eux-mêmes. S’ils étaient accompagnés, c’était du légendaire pâtre landais juché sur des échasses, couvert de peaux de moutons, armé d’un fusil et dont la silhouette se profilait étrange sur l’horizon de cette étrange contrée.

Les bestiaux appartenaient, soit à des particuliers qui les marquaient pour les reconnaître, suit aux communes riveraines. Dans ce dernier cas, ils étaient absolument sauvages, on les abattait à coups de fusil et on les vendait. Une vache valait de 30 à 40 livres. (Brémontier).

M. Fleury de la Teste, dans son mémoire de l’an viii, après avoir dit que l’aspect des dunes ne présente « dans toute leur étendue qu’une nudité absolue, un désert aride et effrayant où l’on chercherait en vain le plus petit arbrisseau », ajoute cependant pour les lettes : « il y croit des herbages excellents et on a remarqué que les bestiaux qui s’y nourrissent y acquièrent un goût extrêmement délicat. »

De Villers se montre plus difficile et avec raison sans doute, quand il écrit dans son 3e mémoire (1779) : « Il croît quelques mauvaises herbes, dans les intervalles des dunes qu’on nomme Leyte, qui servent à la pâture de quelques chevaux aussi sauvages que les païsans qui en sont les propriétaires. »

La surface totale des dunes de Gascogne à la fin du xviiie siècle, est évaluée par Brémontier à 75 lieues carrées (de 2 000 toises) ou 113 887 hectares. Le Rapport sur les différents mémoires de M. Brémontier (Société d’agriculture de la Seine, 1806) leur attribue 233 880m ou 60 lieues de longueur et 1 lieue 1/4 ou 2 500 toises de largeur réduite, soit une superficie de 75 lieues carrées ou 1 139 myriares, exactement 1,139,627,650 mètres carrés. Ce dernier chiffre, multiplié par 17m de hauteur moyenne, donne le cube total de 19,373,670,050 mètres cubes, d’après le même document.

Suivant un état dressé par le service des Ponts et chaussées en 1835, la contenance des dunes était à cette date : de la Pointe de Grave au Junca : 9806ha, du Junca aux Grands Monts : 5010ha, des Grands Monts au sud de l’étang d’Hourtin : 5640ha, soit au total 20 456 hectares pour une région correspondant à peu près à celle du Médoc. On peut, sans erreur notable, admettre pour 1800 le chiffre de 1835, car,