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étendue. « Au reste chaque couche, soit qu’elle soit horizontale ou inclinée, a dans toute son étendue une épaisseur égale, c’est-à-dire chaque lit d’une matière quelconque, pris à part, a une épaisseur égale dans toute son étendue ; par exemple, lorsque, dans une carrière, le lit de pierre dure a 3 pieds d’épaisseur en un endroit, il a ces 3 pieds d’épaisseur partout ; s’il a 6 pieds d’épaisseur en un endroit, il en a 6 partout. Dans les carrières autour de Paris, le lit de bonne pierre n’est pas épais, et il n’a guère que 18 à 20 pouces d’épaisseur partout ; dans d’autres carrières, comme en Bourgogne, la pierre a beaucoup plus d’épaisseur ; il en est de même des marbres ; ceux dont le lit est le plus épais sont les marbres blancs et noirs, ceux de couleur sont ordinairement plus minces, et je connais des lits d’une pierre fort dure et dont les paysans se servent en Bourgogne pour couvrir leurs maisons, qui n’ont qu’un pouce d’épaisseur ; les épaisseurs des différents lits sont donc différentes, mais chaque lit conserve la même épaisseur dans toute son étendue. »

Il admet aussi que toujours les couches d’une colline correspondent exactement à celles de la colline située de l’autre côté des vallons et que les deux collines ont la même hauteur.

« Ces couches parallèles, dit-il[1], ces lits de terre ou de pierre, qui ont été formés par les sédiments des eaux de la mer, s’étendent souvent à des distances très considérables, et même on trouve dans les collines séparées par un vallon les mêmes lits, les mêmes matières, au même niveau. Cette observation, que j’ai faite, s’accorde parfaitement avec celle de l’égalité de la hauteur des collines opposées dont je parlerai tout à l’heure ; on pourra s’assurer aisément de la vérité de ces faits, car, dans tous les vallons étroits, où l’on découvre des rochers, on verra que les mêmes lits de pierre ou de marbre se trouvent des deux côtés à la même hauteur. Dans une campagne que j’habite souvent et où j’ai beaucoup examiné les rochers et les carrières, j’ai trouvé une carrière de marbre qui s’étend à plus de douze lieues en longueur et dont la largeur est fort considérable, quoique je n’aie pas pu m’assurer précisément de cette étendue en largeur. J’ai souvent observé que ce lit de marbre a la même épaisseur partout ; et dans des collines, séparées de cette carrière par un vallon de 100 pieds de profondeur et d’un quart de lieue de largeur, j’ai trouvé le même lit de marbre à la même hauteur ; je suis persuadé qu’il en est de même de toutes les carrières de pierre ou de marbre où l’on trouve des coquilles, car cette observation n’a pas lieu dans les carrières de grès. »

Il applique les mêmes considérations aux couches situées de chaque côté d’un détroit. « On a même observé, dit-il[2], que les lits de terre sont les mêmes des deux côtés des détroits de la mer, et cette observation, qui est

  1. Histoire et théorie de la terre, t. Ier, p. 114.
  2. Ibid., t. Ier, p. 114.