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même que les plaines les plus basses, et par conséquent on ne peut pas attribuer l’origine et la formation des montagnes à des secousses, à des tremblements de terre, non plus qu’à des volcans ; et nous avons des preuves que s’il se forme quelquefois de petites éminences par ces mouvements convulsifs de la terre, ces éminences ne sont pas composées de couches parallèles, que les matières de ces éminences n’ont intérieurement aucune liaison, aucune position régulière, et qu’enfin ces petites collines formées par les volcans ne présentent aux yeux que le désordre d’un tas de matières rejetées confusément ; mais cette espèce d’organisation de la terre que nous découvrons partout, cette situation horizontale et parallèle des couches, ne peuvent venir que d’une cause constante et d’un mouvement réglé et toujours dirigé de la même façon. »

Je ne veux pas revenir ici sur ce qui a été dit plus haut au sujet des erreurs commises par Buffon relativement à la disposition des couches et à la formation des montagnes. Je me borne à faire remarquer avec qu’elle admirable netteté il formule l’idée de la formation de toutes les couches terrestres observables, au moyen du dépôt de sédiments entraînés par les eaux ou abandonnés par elles au fond du lit des mers. Il n’ignore pas cependant que certaines couches de notre globe ont une origine différente et ont été déposées non par la mer, mais par les ruisseaux, les rivières et les fleuves après l’émergement des continents.

« Il faut excepter, dit-il[1], à certains égards, les couches de sable ou de gravier entraînées du sommet des montagnes par la pente des eaux ; ces veines de sable se trouvent quelquefois dans les plaines, où elles s’étendent même assez considérablement ; elles sont ordinairement posées sous la première couche de terre labourable, et dans les lieux plats elles sont de niveau, comme les couches plus anciennes et plus intérieures ; mais au pied et sur la croupe des montagnes, ces couches de sable sont fort inclinées, et elles suivent le penchant de la hauteur sur laquelle elles ont coulé : les rivières et les ruisseaux ont formé ces couches, et en changeant souvent de lit dans les plaines, ils ont entraîné et déposé partout ces sables et ces graviers. Un petit ruisseau coulant des hauteurs voisines suffit, avec le temps, pour étendre une couche de sable et de gravier sur toute la superficie d’un vallon, quelque spacieux qu’il soit, et j’ai souvent observé, dans une campagne environnée de collines, dont la base est de glaise aussi bien que la première couche de la plaine, qu’au-dessus d’un ruisseau qui y coule, la glaise se trouve immédiatement sous la terre labourable, et qu’au-dessous du ruisseau il y a une épaisseur d’environ un pied de sable sur la glaise, qui s’étend à une distance considérable. Ces couches, produites par les rivières et par les autres eaux courantes, ne sont pas de l’ancienne formation : elles se recon-

  1. Histoire et théorie de la terre, t. Ier, p. 48.