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que réduit en ses principes, et qui tend à une décomposition complète ; avec le temps, ces paillettes se seraient atténuées et divisées au point qu’elles n’auraient plus eu assez d’épaisseur et de surface pour réfléchir la lumière, et elles auraient acquis toutes les propriétés des glaises : qu’on regarde au grand jour un morceau d’argile, on y apercevra une grande quantité de ces paillettes talqueuses, qui n’ont pas encore entièrement perdu leur forme. Le sable peut donc, avec le temps, produire l’argile, et celle-ci, en se divisant, acquiert de même les propriétés d’un véritable limon, matière vitrifiable comme l’argile et qui est du même genre.

» Cette théorie est conforme à ce qui se passe tous les jours sous nos yeux : qu’on lave du sable sortant de sa minière, l’eau se chargera d’une assez grande quantité de terre noire, ductile, grasse, de véritable argile. Dans les villes où les rues sont pavées de grès, les boues sont toujours noires et très grasses, et desséchées elles forment une terre de la même nature que l’argile. Qu’on détrempe et qu’on lave de même de l’argile prise dans un terrain où il n’y a ni grès ni cailloux, il se précipitera toujours au fond de l’eau une assez grande quantité de sable vitrifiable. »

Sans entrer dans d’autres détails sur cette question, sans passer en revue toutes les roches et tous les minéraux « vitrifiables » qui présentent les caractères de dépôts aqueux, je me borne à ajouter qu’il n’en est pas un seul auquel on ne puisse appliquer les considérations que nous venons d’émettre relativement aux sables, aux argiles, aux schistes, etc. Tous les minéraux de cet ordre ont une origine première ignée. Tous ont été jadis soumis à l’action du feu, tous ont été incandescents, fondus, tous proviennent, soit de la première couche solide du globe, soit de couches ultérieurement modifiées par le feu, mais tous ont subi l’action ultérieure de l’eau, ont été dissous, dissociés, puis déposés par elle dans le lit ou sur les berges des fleuves, dans le fond ou sur le rivage des mers. Quant au petit nombre de minéraux d’origine ignée que nous avons signalés dans un paragraphe précédent, comme n’ayant subi encore aucune transformation, il est permis d’affirmer qu’ils n’échapperont pas au sort de leurs congénères. Nous avons déjà montré qu’un grand nombre de granits, de basaltes, de trachites, sont chaque jour attaqués par l’eau ; il en est de même de toutes les roches d’origine ignée qui entrent dans la composition de la surface de notre globe, de toutes celles qui sont exposées à l’action de l’eau froide ou chaude, pure ou chargée de gaz atmosphériques.

Formation des roches sédimentaires à base terreuse. Dans la deuxième grande catégorie de roches sédimentaires, ce sont les métaux terreux (sodium, calcium, magnésium), qui forment la base des minéraux. Dans cette catégorie rentrent le sel gemme, les calcaires, la dolomite, le gypse, le quartz cristallisé, etc. Les phénomènes actuels décrits plus haut mettent bien en relief la façon dont ces roches ont été formées. Le sel gemme s’est autrefois déposé dans le fond des mers intérieures ou des lacs salés,