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matières végétales en une infinité d’endroits ; et comme les bitumes et les autres huiles terrestres paraissent provenir des substances végétales et animales, qu’en même temps l’acide provient de la décomposition du sable vitrescible par le feu, l’air et l’eau, et qu’enfin il entre de l’acide dans la composition des bitumes, puisque avec une huile végétale et de l’acide on peut faire du bitume, il paraît que les eaux se sont dès lors mêlées avec ces bitumes et s’en sont imprégnées pour toujours ; et comme elles transportaient incessamment les arbres et les autres matières végétales descendues des hauteurs de la terre, ces matières végétales ont continué de se mêler avec les bitumes déjà formés des résidus des premiers végétaux, et la mer, par son mouvement et par ses courants, les a remuées, transportées et déposées sur les éminences d’argile qu’elle avait formées précédemment.

» Les couches d’ardoises, qui contiennent aussi des végétaux et même des poissons, ont été formées de la même manière, et l’on peut en donner des exemples, qui sont pour ainsi dire sous nos yeux. Ainsi les ardoisières et les mines de charbon ont ensuite été recouvertes par d’autres couches de terres argileuses que la mer a déposées dans des temps postérieurs : il y a même eu des intervalles considérables et des alternatives de mouvement entre l’établissement des différentes couches de charbon dans le même terrain ; car on trouve souvent au-dessous de la première couche de charbon une veine d’argile ou d’autre terre qui suit la même inclinaison ; et ensuite on trouve assez communément une seconde couche de charbon inclinée comme la première, et souvent une troisième, également séparées l’une de l’autre par des veines de terre, et quelquefois même par des bancs de pierres calcaires, comme dans les mines de charbon du Hainaut. L’on ne peut donc pas douter que les couches les plus basses de charbon n’aient été produites les premières par le transport des matières végétales amenées par les eaux ; et lorsque le premier dépôt d’où la mer enlevait ces matières végétales se trouvait épuisé, le mouvement des eaux continuait de transporter au même lieu les terres ou les autres matières qui environnaient ce dépôt : ce sont ces terres qui forment aujourd’hui la veine intermédiaire entre les deux couches de charbon, ce qui suppose que l’eau amenait ensuite de quelque autre dépôt des matières végétales pour former la seconde couche de charbon. J’entends ici par couches la veine entière de charbon, prise dans toute son épaisseur, et non pas les petites couches ou feuillets dont la substance même du charbon est composée, et qui souvent sont extrêmement minces : ce sont ces mêmes feuillets, toujours parallèles entre eux, qui démontrent que ces masses de charbon ont été formées et déposées par le sédiment et même par la stillation des eaux imprégnées de bitume ; et cette même forme de feuillets se trouve dans les nouveaux charbons dont les couches se forment par stillation aux dépens des couches plus anciennes. Ainsi les feuillets du charbon de terre ont pris leur forme par des causes combinées : la première est le dépôt