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aériennes et aqueuses qui forment aujourd’hui les atmosphères et les mers des planètes. Ainsi l’on peut dire qu’à tous égards la matière dont sont composées les planètes est la même que celle du soleil, et qu’il n’y a d’autre différence que par le degré de chaleur, extrême dans le soleil, et plus ou moins attiédie dans les planètes, suivant le rapport composé de leur épaisseur et de leur densité.


III. — Sur le rapport de la densité des planètes avec leur vitesse.

J’ai dit « qu’en suivant la proportion de ces rapports, la densité du globe de la terre ne devrait être que comme 206 7/18 au lieu d’être de 400. »

Cette densité de la terre, qui se trouve ici trop grande relativement à la vitesse de son mouvement autour du soleil, doit être un peu diminuée par une raison qui m’avait échappé ; c’est que la lune, qu’on doit regarder ici comme faisant corps avec la terre, est moins dense dans la raison de 702 à 1000, et que le globe lunaire faisant 1/49 du volume du globe terrestre, il faut par conséquent diminuer la densité 400 de la terre, d’abord dans la raison de 1 000 à 702, ce qui nous donnerait 281, c’est-à-dire, 119 de diminution sur la densité 400, si la lune était aussi grosse que la terre ; mais, comme elle n’en fait ici que la 49e partie, cela ne produit qu’une diminution de 119/49 ou 2 3/7 ; et par conséquent la densité de notre globe relativement à sa vitesse, au lieu de 206 7/18, doit être estimée 206 7/18 + 2 3/7, c’est-à-dire, à peu près 209. D’ailleurs l’on doit présumer que notre globe était moins dense au commencement qu’il ne l’est aujourd’hui, et qu’il l’est devenu beaucoup plus, d’abord par le refroidissement, et ensuite par l’affaissement des vastes cavernes dont son intérieur était rempli : cette opinion s’accorde avec la connaissance que nous avons des bouleversements qui sont arrivés, et qui arrivent encore tous les jours à la surface du globe, et jusqu’à d’assez grandes profondeurs. Ce fait aide même à expliquer comment il est possible que les eaux de la mer aient autrefois été supérieures de deux mille toises aux parties de la terre actuellement habitée ; car ces eaux la couvriraient encore si, par de grands affaissements, la surface de la terre ne s’était abaissée en différents endroits pour former les bassins de la mer et les autres réceptacles des eaux, tels qu’ils sont aujourd’hui.

Si nous supposons le diamètre du globe terrestre de 2 863 lieues, il en avait deux de plus lorsque les eaux le couvraient à 2 000 toises de hauteur. Cette différence du volume de la terre donne 1/477 d’augmentation pour sa densité, par le seul abaissement des eaux : on peut même doubler et peut-être tripler cette augmentation de densité ou cette diminution de volume du globe, par l’affaissement et les éboulements des montagnes, et par le remblai des vallées ; en sorte que depuis la chute des eaux sur la terre, on peut raisonnablement présumer qu’elle a augmenté de plus d’un centième de densité.


IV. — Sur le rapport donné par Newton entre la densité des planètes et le degré de chaleur qu’elles ont à supporter.

J’ai dit « que malgré la confiance que méritent les conjectures de Newton, la densité des planètes a plus de rapport avec leur vitesse qu’avec le degré de chaleur qu’elles ont à supporter. »

Par l’estimation que nous avons faite, dans les mémoires précédents, de l’action de la chaleur solaire sur chaque planète, on a dû remarquer que cette chaleur solaire est en général si peu considérable qu’elle n’a jamais pu produire qu’une très légère différence sur la densité de chaque planète ; car l’action de cette chaleur solaire, qui est faible en elle-même, n’influe sur la densité des matières planétaires qu’à la surface même des planètes ; et elle ne peut agir sur la matière qui est dans l’intérieur des globes planétaires,