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ment, les autres par le moyen du baromètre, qui, n’étant pas sujet à de grandes variations dans ce climat, donne une mesure presque aussi exacte que celle de la trigonométrie. Voici le résultat de leurs observations.

hauteur des montagnes les plus élevées de la province de quito au pérou.
Toises.
Cota-catché, au nord de Quito
2 570
Cayambé-orcou, sous l’équateur
3 030
Pitchincha, volcan en 1539, 1577 et 1660
2 430
Antisana, volcan en 1590
3 020
Sinchoulogoa, volcan en 1660
2 570
Illinica, présumé volcan
2 717
Coto-Paxi, volcan en 1533, 1742 et 1744
2 950
Chimboraço, volcan : on ignore l’époque de son éruption
3 220
Cargavi-Raso, volcan écroulé en 1698
2 450
Tongouragoa, volcan en 1641
2 620
El-altan, l’une des montagnes appelées Coillanes
2 730
Sanguaï, volcan actuellement enflammé depuis 1728
2 680

En comparant ces mesures des montagnes de l’Amérique méridionale avec celles de notre continent, on verra qu’elles sont, en général, élevées d’un quart de plus que celles de l’Europe, et que presque toutes ont été ou sont encore des volcans embrasés, tandis que celles de l’intérieur de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique, même celles qui sont les plus élevées, sont tranquilles depuis un temps immémorial. Il est vrai que dans plusieurs de ces dernières montagnes on reconnaît assez évidemment l’ancienne existence des volcans, tant par les précipices dont les parois sont noires et brûlées que par la nature des matières qui environnent ces précipices, et qui s’étendent sur la croupe de ces montagnes ; mais comme elles sont situées dans l’intérieur des continents, et maintenant très éloignées des mers, l’action de ces feux souterrains, qui ne peut produire de grands effets que par le choc de l’eau, a cessé lorsque les mers se sont éloignées ; et c’est par cette raison que dans les Cordillères, dont les racines bordent pour ainsi dire la mer du Sud, la plupart des pics sont des volcans actuellement agissants, tandis que depuis très longtemps les volcans d’Auvergne, du Vivarais, du Languedoc et ceux d’Allemagne, de la Suisse, etc., en Europe, ceux du mont Ararat, en Asie, et ceux du mont Atlas, en Afrique, sont absolument éteints.

La hauteur à laquelle les vapeurs se glacent est d’environ 2 400 toises sous la zone torride, et, en France, de 1 500 toises de hauteur ; les cimes des hautes montagnes surpassent quelquefois cette ligne de 8 à 900 toises, et toute cette hauteur est couverte de neiges qui ne fondent jamais : les nuages (qui s’élèvent le plus haut) ne les surpassent ensuite que de 3 à 400 toises, et n’excèdent par conséquent le niveau des mers que d’environ 3 600 toises ; ainsi, s’il y avait des montagnes plus hautes encore, on leur verrait, sous la zone torride, une ceinture de neige à 2 400 toises au-dessus de la mer, qui finirait à 3 500 ou 3 600 toises, non par la cessation du froid, qui devient toujours plus vif à mesure qu’on s’élève, mais parce que les vapeurs n’iraient pas plus haut[1].

M. de Keralio, savant physicien, a recueilli toutes les mesures prises par différentes personnes sur la hauteur des montagnes dans plusieurs contrées.

En Grèce, M. Bernoulli a déterminé la hauteur de l’Olympe à 1 017 toises ; ainsi la neige n’y est pas constante, non plus que sur le Pélion en Thessalie, le Cathalylium et le Cyllenou ; la hauteur de ces monts n’atteint pas le degré de la glace. M. Bouguer donne

  1. Mémoires de l’Académie des sciences, année 1744.