toutes les huiles qu’on appelle terrestres, et qu’on regarde vulgairement comme des huiles minérales, sont des bitumes qui tirent leur origine des corps organisés et qui appartiennent encore au règne végétal ou animal : leur inflammabilité, la constance et la durée de leur flamme, la quantité très petite de cendres, ou plutôt de matière charbonneuse qu’ils laissent après la combustion, démontrent assez que ce ne sont que des huiles plus ou moins dénaturées par les sels de la terre, qui leur donnent en même temps la propriété de se durcir et de faire ciment dans la plupart des matières où ils se trouvent incorporés.
Mais pour nous en tenir à la seule considération du charbon de terre dans son état de nature, nous observerons d’abord qu’on peut passer par degrés, de la tourbe récente et sans mélange de bitume, à des tourbes plus anciennes devenues bitumineuses, du bois charbonnifié aux véritables charbons de terre, et que par conséquent on ne peut guère douter, indépendamment des preuves rapportées ci-devant, que ces charbons ne soient de véritables végétaux que le bitume a conservés. Ce qui me fait insister sur ce point, c’est qu’il y a des observateurs qui donnent à ces charbons une tout autre origine : par exemple, M. Genneté prétend que le charbon de terre est produit par un certain roc ou grès auquel il donne le nom d’agas[1] ; et M. de Gensane, l’un de nos plus savants minéralogistes, veut que la substance de ce charbon ne soit que de l’argile. La première opinion n’est fondée que sur ce que M. Genneté a vu des veines de charbon sous des bancs de grès ou d’agas, lesquelles veines paraissent s’augmenter ou se régénérer dans les endroits vides dont on a tiré le charbon quelques années auparavant : il dit positivement que le roc (agas) est la matrice du charbon[2] ; que, dans le pays de Liège, la masse de ce roc est à celle du charbon comme 25 sont à 1 ; en sorte qu’il y a vingt-cinq pieds cubiques de roc pour un pied cube de charbon, et qu’il est étonnant que ces vingt-cinq pieds de roc suffisent pour fournir le suc nécessaire à la formation d’un pied cube de charbon[3] : il assure qu’il se reproduit dans ces mêmes veines trente ou quarante ans après qu’elles ont été vidées, et que ce charbon nouvellement produit les remplit dans ce même espace de temps[4]. « On voit, ajoute-t-il, que la houille est formée d’un suc bitumineux qui distille du roc, s’y arrange en veines d’une grande régularité, s’y durcit comme la pierre ; et voilà aussi sans doute pourquoi elle se reproduit. Mais pendant mille ans qu’une veine de houille demeure entre les bancs de roc qui la soutiennent et la couvrent, sans aucun vide, et sans que cette veine augmente en épaisseur, non plus qu’en long et en large, et encore sans qu’elle fasse dépôt ailleurs, autant qu’on sache, que devient donc le suc bitumineux qui, dans quarante ans, peut reproduire et produit en effet une semblable veine ? Je ne sais, continue-t-il, s’il est possible de dévoiler ce mystère[5]. »
M. Genneté est peut-être de tous nos minéralogistes celui qui a donné les meilleurs renseignements pour l’exploitation des mines de charbon, et je rends bien volontiers justice au mérite de cet habile homme, qui a joint à une excellente pratique de très bonnes
- ↑ « La matrice dans laquelle s’arrangent les veines de houille est une sorte de grès dur comme du fer, dans l’intérieur de la terre, mais qui se réduit en poussière lorsqu’il est exposé à l’air : les houilleurs nomment cette pierre agas. » Genneté, Connaissance des veines de houille, etc., p. 24. — J’ai vu de ces pierres pyriteuses qui sont en effet très dures dans l’intérieur de la terre, et dont on ne peut percer les bancs qu’à force de poudre, et qui se décomposent à l’air ; elles se trouvent assez souvent au-dessus des veines de charbon.
- ↑ Connaissance des veines de houille, etc., p. 25.
- ↑ Idem, p. 25.
- ↑ Idem, p. 123.
- ↑ Idem, p. 124.
mer qui avait une teinture jaune, comme d’une huile ou bitume qui surnageait, et qui, venant à se figer par succession de temps, durcit ainsi que l’ambre jaune ou succin. Voyage à Madagascar, t. Ier, p. 237.