enlevé toute son eau, ne lui a rien fait perdre de son huile ; il faut donc l’en dégager par la distillation pour l’obtenir et le conserver dans son état de pureté et de plus grande force. Cependant la pureté de cet acide n’est jamais absolue ; quelque épuré qu’il soit, il retient toujours une certaine quantité d’huile éthérée qui ne peut que l’affaiblir ; il n’a aucune action directe sur les matières vitreuses, et cependant il agit comme l’acide aérien sur les substances calcaires et métalliques ; il convertit le fer en rouille, le cuivre en vert-de-gris, etc. ; il dissout avec effervescence les terres calcaires, et forme avec elles un sel très amer, qui s’effleurit à l’air ; il agit de même sur les alcalis : c’est par son union avec l’alcali végétal[NdÉ 1] que se fait la terre foliée de tartre[NdÉ 2], qui est employée en médecine comme un puissant apéritif ; on distingue, dans la saveur de cette terre, le goût du vinaigre et celui de l’alcali fixe dont elle est chargée, et elle attire, comme l’alcali, l’humidité de l’air. On peut aisément en dégager l’acide du vinaigre en offrant à son alcali un acide plus puissant.
Le vinaigre dissout avec effervescence l’alcali fixe minéral[NdÉ 3] et l’alcali volatil : cet acide forme avec le premier un sel dont les cristaux et les qualités sont à peu près les mêmes que celles de la terre foliée du tartre, et il produit avec l’alcali volatil un sel ammoniacal qui attire puissamment l’humidité de l’air ; enfin l’acide du vinaigre peut dissoudre toutes les substances animales et végétales. M. Gellert assure que cet acide, aidé d’une chaleur longtemps continuée, réduit en bouillie les bois les plus durs, ainsi que les cornes et les os des animaux.
Les substances qui sont susceptibles de fermentation contiennent du tartre tout formé, avant même d’avoir fermenté[1] ; il se trouve en grande quantité dans tous les sucs du raisin et des autres fruits sucrés : ainsi l’on doit regarder le tartre comme un produit immédiat de la végétation, qui ne souffre point d’altération par la fermentation, puisqu’il se présente sous sa même forme dans les résidus du vin et du vinaigre après la distillation.
Le tartre est donc un dépôt salin qui se sépare peu à peu des liqueurs vineuses, et prend une forme concrète et presque pierreuse, dans laquelle on distingue néanmoins quelques parties cristallisées : la saveur du tartre, quoique acide, est encore sensiblement vineuse ; les chimistes ont donné le nom de crème de tartre[NdÉ 4] au sel cristallisé que l’on en tire, et ce sel n’est pas simple ; il est combiné avec l’alcali végétal. L’acide, contenu dans ce sel de tartre, se sépare de sa base par la seule action du feu ; il s’élève en
- ↑ M. Wiegleb dit que l’acide oxalin, ou sel essentiel de l’oseille, appartient naturellement aux sels tartareux, et forme un acide particulier uni à un alcali fixe, qui en est saturé avec excès : il se distingue des autres sels tartareux, tant par un goût acide supérieur que par la figure de ses cristaux, et de plus, par les qualités toutes particulières des parties constituantes de l’acide qui lui est propre : on le prépare en grande quantité dans différentes contrées avec le suc de l’oseille, comme en Suisse, en Souabe, au Hartz et dans les forêts de Thuringe ; mais celui qui se fait en Suisse a l’avantage d’être parfaitement blanc, en cristaux assez gros et très beaux.
Par les expériences de M. Wiegleb sur le sel oxalin, il paraît que ce sel est exactement un pur acide végétal, et que cet acide a une très grande affinité avec la terre calcaire. Le même auteur s’est convaincu que l’acide du sel d’oseille pouvait décomposer le nitre et le sel marin : et que néanmoins cet acide n’est proprement ni de l’acide nitreux, ni de l’acide marin, ni de l’acide vitriolique. Extrait du Journal de physique, supplément au mois de juillet 1782.