Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/161

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Lorsque Leeuwenhoek se fut une fois persuadé que les animaux spermatiques se transformaient en hommes ou en animaux, il crut remarquer dans les liqueurs séminales de chaque espèce d’animal deux sortes d’animaux spermatiques, les uns mâles et les autres femelles, et cette différence de sexe servait, selon lui, non seulement à la génération de ces animaux entre eux, mais aussi à la production des mâles et des femelles qui doivent venir au monde, ce qu’il était assez difficile de concevoir par la simple transformation, si ces animaux spermatiques n’avaient pas eu auparavant différents sexes. Il parle de ces animalcules mâles et femelles dans sa lettre imprimée dans les Transactions philosophiques, no 145, et dans plusieurs autres endroits (voyez t. Ier, p. 163, et t. III, p. 101 du recueil de ses ouvrages) ; mais nulle part il ne donne la description ou les différences de ces animaux mâles et femelles, lesquels n’ont en effet jamais existé que dans son imagination.

Le fameux Boerhaave ayant demandé à Leeuwenhoek s’il n’avait pas observé dans les animaux spermatiques différents degrés d’accroissement et de grandeur, Leeuwenhoek lui répond qu’ayant fait disséquer un lapin, il a pris la liqueur qui était dans les épididymes, et qu’il a vu et fait voir à deux autres personnes une infinité d’animaux vivants : « Incredibilem, dit-il, viventium animalculorum numerum conspexerunt, cùm hæc animalcula scypho imposita vitreo et illic emortua, in rariores ordines disparassem, et per continuos aliquot dies sæpiùs visu examinassem, quædam ad justam magnitudinem nondum excrevisse adverti. Ad hæc quasdam observavi particulas perexiles et oblongas, alias aliis majores, et, quantum oculis apparebat, caudâ destitutas ; quas quidem particulas non nisi animalcula esse credidi, quæ ad justam magnitudinem non excrevissent. » (Voyez t. IV, p. 280 et 281.) Voilà donc des animaux de plusieurs grandeurs différentes, voilà des animaux avec des queues, et des animaux sans queues, ce qui s’accorde beaucoup mieux avec nos observations qu’avec le propre système de Leeuwenhoek ; nous différons seulement sur cet article, en ce qu’il dit que ces particules oblongues et sans queues étaient de jeunes animalcules qui n’avaient pas encore pris leur juste accroissement, et qu’au contraire j’ai vu ces prétendus animaux naître avec des queues ou des filets, et ensuite les perdre peu à peu.

Dans la même lettre à Boerhaave il dit, tome IV, page 28, qu’ayant fait apporter chez lui les testicules encore chauds d’un bélier qui venait d’être tué il vit, dans la liqueur qu’il en tira, les animalcules aller en troupeau comme vont les moutons. « A tribus circiter annis testes arietis, adhuc calentes, ad ædes meas deferri curaveram ; cùm igitur materiam ex epididymibus eductam, ope microscopii contemplarer, non sine ingenti voluptate advertebam animalcula omnia, quotquot innatabant semini masculino, eumdem natando cursum tenere, ità nimirùm ut quo itinere priora prænatarent, eodem posteriora subsequerentur, adeo ut hisce animalculis quasi