Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/250

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fort gros et en très grand nombre, tandis qu’à l’exception du point auquel ils aboutissent, le corps entier du petit poulet n’est qu’une matière blanche et presque transparente, dans laquelle il n’y a encore aucun vaisseau sanguin.

On pourrait croire que la liqueur de l’amnios est une nourriture que le fœtus reçoit par la bouche ; quelques observateurs prétendent avoir reconnu cette liqueur dans son estomac et avoir vu quelques fœtus auxquels le cordon ombilical manquait entièrement, et d’autres qui n’en avaient qu’une très petite portion qui ne tenait point au placenta ; mais, dans ce cas, la liqueur de l’amnios ne pourrait-elle pas entrer dans le corps du fœtus par la petite portion du cordon ombilical, ou par l’ombilic même ? D’ailleurs, on peut opposer à ces observations d’autres observations. On a trouvé quelquefois des fœtus qui avaient la bouche fermée et dont les lèvres n’étaient pas séparées ; on en a vu aussi dont l’œsophage n’avait aucune ouverture : pour concilier tous ces faits, il s’est trouvé des anatomistes qui ont cru que les aliments passaient au fœtus en partie par le cordon ombilical et en partie par la bouche. Il me paraît qu’aucune de ces opinions n’est fondée ; il n’est pas question d’examiner le seul accroissement du fœtus et de chercher d’où et par où il tire sa nourriture ; il s’agit de savoir comment se fait l’accroissement du tout, car le placenta, la liqueur et les enveloppes croissent et augmentent aussi bien que le fœtus, et par conséquent ces instruments, ces canaux, employés à recevoir ou à porter cette nourriture au fœtus, ont eux-mêmes une espèce de vie. Le développement ou l’accroissement du placenta et des enveloppes est aussi difficile à concevoir que celui du fœtus, et on pourrait également dire, comme je l’ai déjà insinué, que le fœtus nourrit le placenta, comme l’on dit que le placenta nourrit le fœtus. Le tout est, comme l’on sait, flottant dans la matrice et sans aucune adhérence dans les commencements de cet accroissement : ainsi il ne peut se faire que par une intussusception de la matière laiteuse qui est contenue dans la matrice ; le placenta paraît tirer le premier cette nourriture, convertir ce lait en sang et le porter au fœtus par des veines ; la liqueur de l’amnios ne paraît être que cette même liqueur laiteuse dépurée, dont la quantité augmente par une pareille intussusception, à mesure que cette membrane prend de l’accroissement, et le fœtus peut tirer de cette liqueur, par la même voie d’intussusception, la nourriture nécessaire à son développement, car on doit observer que dans les premiers temps, et même jusqu’à deux et trois mois, le corps du fœtus ne contient que très peu de sang ; il est blanc comme de l’ivoire, et ne paraît être composé que de lymphe qui a pris de la solidité ; et comme la peau est transparente et que toutes les parties sont très molles, on peut aisément concevoir que la liqueur dans laquelle le fœtus nage peut les pénétrer immédiatement et fournir ainsi la matière nécessaire à sa nutrition et à son développement. Seulement on peut croire que dans les derniers temps