Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/383

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le même chien : j’ai cru devoir rapporter les passages d’Aristote en entier, afin qu’on juge si ma conjecture est fondée[1].

Le genre des animaux cruels est l’un des plus nombreux et des plus variés ; le mal semble, ici comme ailleurs, se reproduire sous toutes sortes de formes et se revêtir de plusieurs natures. Le lion et le tigre, comme espèces isolées, sont en première ligne ; toutes les autres, savoir, les panthères, les onces, les léopards, les guépards, les lynx, les caracals, les jaguars, les couguars, les ocelots, les servals, les margais et les chats ne font qu’une même et méchante famille, dont les différentes branches se sont

  1. « Laconici canes ex vulpe et cane generantur. » Hist. anim., lib. viii, cap. xxviii… « Canum genera plura sunt. Coït laconicum mense suæ ætatis octavo et crus jam circa id tempus attolentes nonnulli urinam reddunt… Gerunt laconicæ canes uterum parte sextâ anni, hoc est, sexagenis diebus aut uno vel altero, plus minùsve. Catelli cæci gignuntur, nec ante duodecimum diem visum accipiunt. Cœunt canes posteaquam parerunt sexto mense nec citiùs. Sunt quæ parte quintâ anni uterum ferunt, hoc est, duobus et septuaginta diebus, quarum catelli duodecim diebus luce carent : nonnullæ quartâ parte anni, hoc est, tribus mensibus ferunt, quarum catelli diebus decem et septem luce carent. Lac ante diebus quinque quàm pariant, habent canes magnâ ex parte ; verùm nonnullis etiam septem aut quatuor diebus anticipat : utile statim ut pepererint est ; genus laconicum post coïtum diebus triginta habere lac incipit… parit canis duodecim complurimùm, sed magnâ ex parte octo pariunt. Cœunt quandiù vivunt et mares et fœminæ : peculiare generis laconici est ut cùm laborarint coire meliùs quàm per otium possint ; vivit in hoc eodem genere mas ad annos decem, fœmina ad duodecim : cæteri canes maximâ quidem ex parte ad annos quatuordecim : sed nonnulli vel ad viginti protrahunt vitam… Laconici sanè generis fœminas, quia minùs laborant quàm mares, vivaciores maribus sunt : at serò in cæteris, et si non latè admodum constat, tamen mares vivaciores sunt. » Idem, lib. vi, cap. xx… « Fœminam et marem natura distinxit moribus ; sunt enim fœminæ moribus mollioribus, mitescunt celeriùs et manum faciliùs patiuntur : discunt etiam imitanturque ingeniosiùs, ut in genere canum laconico fœminas esse sagaciores quàm mares apertum est. Moloticum etiam genus venaticum nihilò à cæteris discrepat, at pecuarium longè et magnitudine et fortitudine contra belluas præstat : insignes verò animo et industriâ qui ex utroque moloticum dico et laconicum prodierint. » Idem, lib. ix, cap. i.

    Nota. Il faut observer que le mot genus ne doit pas s’interpréter ici par celui d’espèce, mais par le mot race. Aristote y distingue trois races de chiens laconicus, moloticus et pecuarius ; le moloticus, qu’il appelle aussi venaticus, est vraisemblablement notre lévrier, qui, dans la Grèce et l’Asie Mineure, est le chien de chasse ordinaire ; le pecuarius, qu’il dit excéder de beaucoup les autres chiens par la grandeur et par la forme, est sans doute le mâtin, dont on se sert pour la garde et la défense du bétail contre les bêtes féroces ; et le laconicus, duquel il ne désigne pas l’emploi, et qu’il dit seulement être un chien de travail et d’industrie, et qui est de plus petite taille que le pecuarius, ne peut être que le chien de berger, qui travaille en effet beaucoup à ranger, contenir et conduire les moutons, et qui est plus industrieux, plus attentif et plus soigneux que tous les autres chiens : mais ce n’est pas là ce qu’il y a de plus difficile à entendre dans ces passages d’Aristote, c’est ce qu’il dit de la différente durée de la gestation dans les différentes races de chiens, dont, selon lui, les uns portent deux mois, les autres portent deux mois et demi, et les autres trois mois, car tous nos chiens, de quelque race qu’ils soient, ne portent également que pendant environ neuf semaines, c’est-à-dire, soixante et un, soixante-deux ou soixante-trois jours, et je ne sache pas qu’on ait remarqué de plus grandes différences de temps que celle de ces trois ou quatre jours ; mais Aristote pouvait en savoir sur cela plus que nous, et si ces faits qu’il a avancés sont vrais, il en résulterait un rapprochement bien plus grand de certains chiens avec le loup ; car les chasseurs assurent que la louve porte trois mois ou trois mois et demi.