Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome IV, Partie 2.djvu/455

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Il en est de même des ânes, qui étaient également inconnus, et qui ont également réussi dans les climats chauds de ce nouveau continent ; ils ont même produit des mulets, qui sont plus utiles que les lamas pour porter des fardeaux dans toutes les parties montagneuses du Chili, du Pérou, de la Nouvelle-Espagne, etc.

Le zèbre[1] est encore un animal de l’ancien continent, et qui n’a peut-être jamais été transporté ni vu dans le nouveau ; il paraît affecter un climat particulier et ne se trouve guère que dans cette partie de l’Afrique qui s’étend depuis l’équateur jusqu’au cap de Bonne-Espérance.

Le bœuf ne s’est trouvé ni dans les îles ni dans la terre ferme de l’Amérique méridionale : peu de temps après la découverte de ces nouvelles terres, les Espagnols y transportèrent d’Europe des taureaux et des vaches. En 1550, on laboura pour la première fois la terre avec des bœufs[2] dans la vallée de Cusco. Ces animaux multiplièrent prodigieusement dans ce continent, aussi bien que dans les îles de Saint-Domingue, de Cuba, de Barlovento, etc. ; ils devinrent même sauvages en plusieurs endroits. L’espèce de bœuf qui s’est trouvée au Mexique, à la Louisiane, etc.[3], et que nous avons appelé bœuf sauvage ou bison, n’est point issue de nos bœufs ; le bison existait en Amérique avant qu’on y eût transporté le bœuf d’Europe, et il diffère assez de celui-ci pour qu’on puisse le considérer comme faisant une espèce à part : il porte une bosse entre les épaules ; son poil est plus doux que la laine, plus long sur le devant du corps que sur le derrière, et crêpé sur le cou et le long de l’épine du dos ; la couleur en est brune, obscurément marquée de taches blanchâtres. Le bison a de plus les jambes courtes ; elles sont, comme la tête et la gorge, couvertes d’un long poil : le mâle a la queue longue avec une houppe de poil au bout, comme on le voit à la queue du lion. Quoique ces différences m’aient paru suffisantes, ainsi qu’à tous les autres naturalistes, pour faire du bœuf et du bison[4] deux espèces différentes, cependant je ne prétends pas l’assurer affirmativement : comme le seul caractère qui différencie ou identifie les espèces est la faculté de produire des individus qui ont eux-mêmes celle de produire leurs semblables, et que personne ne nous a appris si le bison peut produire avec le bœuf, que probablement même on n’a jamais essayé de les mêler ensemble, nous ne

    dans les autres îles et dans la terre ferme du nouveau continent. M. Aubert, second gouverneur de la Guadeloupe, a commencé le premier pré dans cette île et y a fait apporter les premiers chevaux. Histoire générale des Antilles, par le P. du Tertre. Paris, 1667, t. II, p. 289.

  1. Zebra. Ray, Syn. quad., p. 69. — Edwards, Gleanings of natural History. London, 1758, p. 27 et 29. — Âne sauvage. Kolbe, t. III, p. 22. — Le zèbre ou l’âne rayé. Brisson, Règne animal, p. 101.
  2. Voyez l’Histoire des Incas. Paris, 1744, t. II, p. 266 et suiv.
  3. Voyez l’Histoire du nouveau monde, par Jean de Læt. Leyde, 1640, liv. x, chap. iv.
  4. Voyez l’article du bœuf.