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LE GUIRAROU. 339

d’une cloche fêlée (kur, kur, kur). Au reste, dans toute l’année, il ne se fait entendre que pendant environ six semaines du grand été, c’est-à-dire en décembre et janvier, d’où lui vient son nom portugais ave de verano, oiseau d’été. On a observé que sa poitrine est marquée extérieurement d’un sillon qui en parcourt toute la longueur, et que de plus il a la trachée- artère fort ample, ce qui peut avoir quelque influence sur la force de sa voix.

LE GUIRAROU (a)

Si la beauté du plumage était un attribut caractéristique de la famille des cotingas, l’oiseau (*) dont il s’agit ici et celui de l’article précédent ne pour- raient passer tout au plus que pour des cotingas dégénérés. Le guirarou n’a rien de remarquable ni dans ses couleurs ni dans leurs distributions, si ce n’est peut-être une bande noire qui passe par ses yeux, dont l’iris est cou- leur de saphir, et qui donne un peu de physionomie à cet oiseau ; au reste, un gris clair uniforme règne sur la tête, le cou, la poitrine et tout le des- sous du corps ; les jambes et le dessus du corps sont cendrés ; les pennes et les couvertures de l’aile noirâtres ; les pennes de la queue noires, terminées de blanc, et ses couvertures supérieures blanches ; enfin, le bec et les pieds sont noirs.

La forme un peu aplatie et le peu de longueur du bec du guirarou ; la force de sa voix assez semblable à celle du merle, mais plus aiguë, et son séjour de préférence sur le bord des eaux, sont les rapports les plus marqués que cet oiseau ait avec les cotingas : il est aussi de la même taille à peu près, et il habite les mêmes climats ; mais tout cela n’a pas empêché Willughby de le rapporter à la famille des motteux, ni d’autres onithologistes fort habiles d’en faire un gobe-mouche : pour moi je n’en fais ni un motteux ni un gobe-mou- che, ni même un cotinga, mais je lui conserve le nom qu’il porte dans son pays natal, en attendant que des observations plus détaillées, faites sur un plus grand nombre d’individus, et d’individus vivants, me mettent en état de lui fixer sa véritable place. Les guirarous sont assez communs dans l’inté- rieur de la Guiane, mais non pas à Cayenne ; ils voyagent peu : on en trouve ordinairement plusieurs dans le même canton ; ils se perchent sur les bran- ches les plus basses de certains grands arbres, où ils trouvent des graines

(a) « Guiraru nheengeta Brasiliensibus. » Marcgrave, Brasil., p. 209. — Jonston, pl. 59, d’après celle de Marcgrave, qui n’est rien moins qu’exacte. — « OEnanthe Americana, guiraru Marcgravii. » Willughby, p. 170. — « Cotinga supernè cinerea, infernè alba, ad griseum dilutum vergens ; tæniâ utrimque per oculos nigrâ ; remigibus nigricantibus ; restricibus nigris, apice albis... » Cotinga cinerea, cotinga gris. Brisson, t. II, p 353.

(*) Lanius Nengeta L.