Page:Buffon - Oeuvres completes, 1829, T01.djvu/154

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
70
MANIÈRE D’ÉTUDIER

les poëtes en ont tirées, tous les attributs que certains peuples leur ont accordés, toutes les représentations qu’on en fait dans les hiéroglyphes, dans les armoiries, en un mot, toutes les fables dont on s’est jamais avisé au sujet des coqs ou des bœufs. Qu’on juge après cela de la portion d’histoire naturelle qu’on doit s’attendre à trouver dans ce fatras d’écritures ; et si en effet l’auteur ne l’eût pas mise dans des articles séparés des autres, elle n’auroit pas été trouvable, ou du moins elle n’auroit pas valu la peine d’y être cherchée.

On s’est tout-à-fait corrigé de ce défaut dans ce siècle : l’ordre et la précision avec laquelle on écrit maintenant ont rendu les sciences plus agréables, plus aisées ; et je suis persuadé que cette différence de style contribue peut-être autant à leur avancement que l’esprit de recherche qui règne aujourd’hui ; car nos prédécesseurs cherchoient comme nous, mais ils ramassoient tout ce qui se présentoit ; au lieu que nous rejetons ce qui nous paroît avoir peu de valeur, et que nous préférons un petit ouvrage bien raisonné à un gros volume bien savant : seulement il est à craindre que, venant à mépriser l’érudition, nous ne venions aussi à imaginer que l’esprit peut suppléer a tout, et que la science n’est qu’un vain nom.

Les gens sensés cependant sentiront toujours que la seule et vraie science est la connoissance des faits : l’esprit ne peut pas y suppléer, et les faits sont dans les sciences ce qu’est l’expérience dans la vie civile. On pourroit donc diviser toutes les sciences en deux classes principales, qui contiendroient tout ce qu’il convient à l’homme de savoir : la première est l’histoire civile, et la seconde l’histoire naturelle, toutes