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THÉORIE DE LA TERRE.

vants, sont les mêmes, et qu’on ne peut douter de leur parfaite ressemblance, ni de l’identité de leurs

    posent une partie assez considérable des couches extérieures de la surface du globe, c’est-à-dire, toute la matière calcaire, qui, comme l’on sait, est très commune et très abondante en plusieurs contrées. Mais au dessus des plus hauts points d’élévation, c’est-à-dire, au dessus de 1500 ou 2000 toises de hauteur, et souvent plus bas, on a remarqué que les sommets de plusieurs montagnes sont composés de roc vif, de granite, et d’autres matières vitrescibles produites par le feu primitif, lesquelles ne contiennent en effet ni coquilles, ni madrépores, ni rien qui ait rapport aux matières calcaires. On peut donc en inférer que la mer n’a pas atteint, ou du moins n’a surmonté que pendant un petit temps, ces parties les plus élevées et ces pointes les plus avancées de la surface de la terre.

    Comme l’observation de don Ulloa, que nous venons de citer au sujet des coquilles trouvées sur les Cordilières, pourroit paroître encore douteuse, ou du moins comme isolée et ne faisant qu’un seul exemple, nous devons rapporter à l’appui de son témoignage celui d’Alphonse Barba, qui dit qu’au milieu de la partie la plus montagneuse du Pérou, on trouve des coquilles de toutes grandeurs, les unes concaves et les autres convexes, et très bien imprimées. Ainsi l’Amérique, comme toutes les autres parties du monde, a également été couverte par les eaux de la mer ; et si les premiers observateurs ont cru qu’on ne trouvoit point de coquilles sur les montagnes des Cordillères, c’est que ces montagnes, les plus élevées de la terre, sont pour la plupart des volcans actuellement agissants, ou des volcans éteints, lesquels, par leurs éruptions, ont recouvert de matières brûlées toutes les terres adjacentes ; ce qui a non seulement enfoui, mais détruit toutes les coquilles qui pouvoient s’y trouver. Il ne seroit donc pas étonnant qu’on ne rencontrât point de productions marines autour de ces montagnes, qui sont aujourd’hui ou qui ont été autrefois embrasées ; car le terrain qui les enveloppe ne doit être qu’un composé de cendres, de scories, de verre, de lave, et d’autres matières brûlées ou vitrifiées ; ainsi il n’y a d’autre fondement à l’opinion de ceux qui prétendent que la mer n’a pas couvert les montagnes, si ce n’est qu’il y a plusieurs de leurs sommets où l’on ne voit aucune coquille ni autres productions marines. Mais comme on trouve en une infinité d’endroits, et jusqu’à 1500 et 2000 toises de hauteur, des coquilles et d’autres productions de la mer, il est évident qu’il y a eu peu de pointes ou crêtes de montagnes qui n’aient été surmontées par