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Page:Buffon - Oeuvres completes, 1829, T01.djvu/355

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ART. VI. GÉOGRAPHIE.

n’est donc pas par le défaut des connoissances astronomiques que les anciens n’ont pas trouvé le Nouveau-Monde, mais uniquement par le défaut de la boussole : les passages de Platon et d’Aristote, où ils parlent de terres fort éloignées au delà des colonnes d’Hercule, semblent indiquer que quelques navigateurs avoient été poussés par la tempête jusqu’en Amérique, d’où ils n’étoient revenus qu’avec des peines infinies : et on peut conjecturer que quand même les anciens auroient été persuadés de l’existence de ce continent par la relation de ces navigateurs, ils n’auroient pas même pensé qu’il fut possible de s’y frayer des routes, n’ayant aucun guide, aucune connoissance de la boussole.

J’avoue qu’il n’est pas absolument impossible de voyager dans les hautes mers sans boussole, et que des gens bien déterminés auroient pu entreprendre d’aller chercher le Nouveau-Monde, en se conduisant seulement par les étoiles voisines du pôle. L’astrolabe surtout étant connu des anciens, il pouvoit leur venir dans l’esprit de partir de France ou d’Espagne, et de faire route vers l’occident, en laissant toujours l’étoile polaire à droite, et en prenant souvent hauteur pour se conduire à peu près sous le même parallèle : c’est sans doute de cette façon que les Carthaginois dont parle Aristote, trouvèrent le moyen de revenir de ces terres éloignées, en laissant l’étoile polaire à gauche ; mais on doit convenir qu’un pareil voyage ne pouvoit être regardé que comme une entreprise téméraire, et que par conséquent nous ne devons pas être étonnés que les anciens n’en aient pas même conçu le projet.