immortels, il portoit en lui le sentiment de sa destinée ; et c’étoit alors une prédiction qui fut bientôt accomplie.
Je n’aurois jamais osé, messieurs, parler ici de l’élocution et du style, si, en essayant d’apprécier M. de Buffon sous ce rapport, je n’avois été conduit par M. de Buffon lui-même. C’est en lisant ses ouvrages que l’on éprouve toute la puissance du talent qui les a produits, et de l’art qui les a formés. Je sens mieux que personne combien il est difficile de célébrer dignement tant de dons rassemblés ; et lors même que cet éloge me ramène aux objets les plus familiers de mes travaux, j’ai lieu de douter encore que j’aie rempli votre attente. Mais les ouvrages de M. de Buffon sont si répandus, et l’on s’est tant occupé de la nature en l’étudiant dans ses écrits, que pour donner de ce grand homme l’idée que j’en ai conçue, je n’ai pas craint, messieurs, de vous entretenir aussi des plus profonds objets de ses méditations et de ses travaux.
Avant de parler de l’homme et des animaux, M. de Buffon devoit décrire la terre qu’ils habitent, et qui est leur domaine commun ; mais la théorie de ce globe lui parut tenir au système entier de l’univers ; et différents phénomènes, tels que l’augmentation successive des glaces vers les pôles, et la découverte des ossements des grands animaux dans le nord, annonçant qu’il avoit existé sur cette partie de notre planète une autre température, M. de Buffon chercha, sans la trouver, la solution de cette grande énigme dans la suite des faits connus. Libre alors, son imagination féconde osa suppléer à ce que les travaux des hommes n’avoient pu découvrir. Il dit avec Hésiode : Vous con-