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ART. VIII. PRODUCTIONS DE LA MER.

vant le déluge la terre n’ait été composée des mêmes matières dont elle l’est aujourd’hui.

Par tout ce que nous venons de dire, on peut être assuré qu’on trouve des coquilles pétrifiées en Europe, en Asie, et en Afrique, dans tous les lieux où le hasard a conduit les observateurs : on en trouve aussi en Amérique, au Brésil, dans le Tucuman, dans les terres Magellaniques, et en si grande quantité dans les îles Antilles, qu’au dessous de la terre labourable, le fond, que les habitants appellent la chaux, n’est autre chose qu’un composé de coquilles, de madrépores, d’astroïtes, et d’autres productions de la mer. Ces observations, qui sont certaines, m’auroient fait penser qu’il y a de même des coquilles et d’autres productions marines pétrifiées dans la plus grande partie du continent de l’Amérique, et surtout dans les montagnes, comme l’assure Woodward : cependant M. de La Condamine, qui a demeuré pendant plusieurs années au Pérou, m’a assuré qu’il n’en avoit pas vu dans les Cordilières ; qu’il en avoit cherché inutilement, et qu’il ne croyoit pas qu’il y en eût. Cette exception seroit singulière, et les conséquences qu’on en pourroit tirer le seroient encore plus : mais j’avoue que, malgré le témoignage de ce célèbre observateur, je doute encore à cet égard, et je suis très porté à croire qu’il y a dans les montagnes du Pérou, comme partout ailleurs, des coquilles et d’autres pétrifications marines, mais qu’elles ne se sont pas offertes à ses yeux. On sait qu’en matière de témoignage, deux témoins positifs qui assurent avoir vu suffisent pour faire preuve complète, tandis que mille et dix mille témoins négatifs, et qui assurent seulement n’avoir